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mardi 21 janvier 2025
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La dégradation de l’enseignement en Algérie

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Feu Boudiaf à la tête de l’État a qualifié avec lucidité et courage l’école algérienne « d’école sinistrée ». Cet amer constat est partagé par tous les Algériens conscients et soucieux de l’avenir de leurs enfants et de celui de la patrie. La dégradation de notre système éducatif est devenue un sujet quotidien qu’on entend dans la rue, au marché, au hammam au sein des établissements scolaires… Il n’y a que les décideurs qui ne partagent pas ce désastreux bilan.

Les parents et les enseignants qui sont les premiers concernés par ce secteur malade vivent en permanence la boule au ventre. Les premiers soucieux de l’avenir de leurs enfants exclus prématurément de l’école. Les seconds dont le métier était jadis noble vivent le calvaire d’une profession devenue un combat quotidien soutenu dans la perspective d’une retraite qu’ils espèrent toujours anticipée pour mettre fin à cette existence cauchemardesque pour qu’ils puissent goûter à ce repos tant attendu et tant espéré.

La question qui s’impose d’elle-même est la suivante : Que recouvre le constat d’une réalité ainsi dénoncée de manière quasi unanime ?

C’est ce que nous allons essayer de décrypter en examinant un certain nombre d’aspects attachés à notre système éducatif en nous limitant au deuxième cycle qui est l’enseignement moyen.

Ce dernier reçoit en sa première année les élèves issus de l’école primaire, admis majoritairement à un examen d’entrée en sixième devenu presque une simple formalité (démocratisation de l’enseignement oblige). De ce fait, les classes de ce cycle demeurent encore surchargées malgré une démographie en légère baisse. Ainsi, la moyenne de l’effectif d’une classe dépasse souvent la trentaine, facteur constituant déjà un obstacle pour une prise en charge pédagogique digne de ce nom. Bien entendu, la crise économique de 1986 a déjà mis en place la politique d’austérité, selon les recommandations du FMI (Fonds Monétaire International) et de la BM (Banque Mondiale) qui ont limité les budgets alloués aux différents ministères et particulièrement à celui de l’Éducation nationale. Aussi la distorsion, c’est-à-dire la différence entre la population scolaire et les moyens humains mis au service de cette population, ira en grandissant : moins d’enseignants, moins d’infrastructures pour un effectif toujours aussi élevé que celui du boom démographique des années 70 et 80. Il est clair que les conditions pédagogiques ne sont pas réunies pour une prise en charge effective de l’élève et que la tâche de l’enseignant s’en trouve d’autant plus compliquée que le suivi de l’élève s’en trouve amoindri. D’autant plus que la méthode actuelle d’enseignement, « l’approche par compétence » imposée par l’ouverture à l’économie de marché, requiert un effectif adéquat par classe comme dans les pays développés à l’instar du Canada, qui avoisine la dizaine au plus. Nos écoles pour des considérations sociales liées au terrorisme et maintenant au banditisme se transforment progressivement en garderies, subordonnant leurs missions premières qui sont l’éducation et la transmission du savoir à celle de gardienne de la paix sociale habituellement dévolue aux autorités compétentes.

La première conséquence d’une telle situation est bien entendu l’indiscipline qui caractérise désormais les établissements scolaires qui absorbent les efforts de l’enseignant, car la maîtrise de ces effectifs pléthoriques requiert vigilance et force de caractère d’autant plus grande que l’élève jouit d’une impunité totale. Ainsi, la pire sanction encourue par ce dernier est son transfert vers un autre établissement, car l’exclusion est un ultime recours que la direction de l’éducation réprouve toujours d’autant plus qu’au niveau de l’enseignement moyen, seule la rue est en mesure d’accueillir un enfant éventuellement déchu.

Un facteur nouveau dans la dégradation de l’enseignement et du comportement sociétal est l’Internet. Cet instrument du savoir qui, utilisé de manière judicieuse, peut offrir toutes les connaissances possibles et imaginables, devient par excellence le moyen de déperdition de la jeunesse désormais branchée constamment sur les réseaux sociaux, tchatchant et papotant sur Facebook, délaissant le travail nécessaire à l’acquisition des connaissances basiques, qui les propulseront vers des perspectives lointaines qui feront d’eux les futurs cadres du pays. L’absence de l’effort au travail, le maigre temps consacré à l’apprentissage et à la révision des leçons chez soi après avoir quitté l’école, confère au savoir ainsi acquis un caractère superficiel survolant ou plutôt effleurant la connaissance.

Il reste cependant vrai que certains parents se préoccupent de leur progéniture à laquelle ils consacrent et leur temps (lorsqu’ils sont encore en mesure de leur inculquer certains savoirs) et leur argent à travers des cours privés surtout l’année de la préparation du BEF ou bien du BAC, cours privés dont l’existence montre les carences de l’école publique désormais concurrencée par l’émergence d’écoles privées agrées par l’État.

D’autres éléments pourraient être invoqués pour expliquer globalement cette dégradation de l’enseignement :

  • L’arabisation mise en concurrence avec l’existence même de la langue française dans un esprit de revanche contre la langue du colon et menée au pas de charge explique-t-elle à elle seule la chute du niveau du système éducatif ?
  • La démocratisation de l’enseignement instituant « l’école pour tous » rendant les effectifs des classes pléthoriques n’a-t-elle pas sa part de responsabilité dans la détérioration de l’enseignement en Algérie ?
  • Les différentes réformes mises en œuvre depuis l’indépendance essaient tant bien que mal d’endiguer et de pallier les faiblesses observées dans notre système d’enseignement mal classé au niveau international. Mais suffiront-elles à elles seules dans un climat social empreint de tensions politiques, religieuses et idéologiques, à instaurer un climat de paix et sérénité pour élaguer et défricher un système éducatif décidément traversé de toutes parts par des considérations extrascolaires, autres que scolaires ?

Vers les années 60 et 70, les bacheliers issus de l’université algérienne rejoignaient les universités françaises, Américaines ou russes dans lesquelles, ils étaient admis sans difficulté et accomplissaient leur cycle d’études universitaire (et quelquefois postuniversitaire) avec succès.

L’Algérie pourra-t-elle retrouver son lustre d’antan parmi les grandes nations ?

Et l’université d’Alger pourra-t-elle être de nouveau citée dans les séminaires internationaux pour sa contribution au savoir universel ?

Pour cela, il faudra rehausser non seulement le niveau des élèves en instaurant de nouveau la rigueur dans les examens et même dans les évaluations continues, mais également celui des enseignants par une exigence de niveau supérieur, de l’ordre de l’agrégation pour l’enseignement secondaire et même moyen, d’un niveau du baccalauréat suivi d’un nombre d’années d’études à l’université pour le niveau primaire. Ces études, bien entendu, doivent être adossées à une formation pédagogique spécifique à l’enseignement et non plus seulement à quelques regroupements conjoncturels sous la direction d’inspecteurs dont la mission à la longue est devenue plus coercitive que pédagogique qui s’attache davantage à l’aspect formel de l’enseignement (cahier de textes, avancement du programme, correction des cahiers, nombre de devoirs faits…) qui absorbe le temps et la santé de l’enseignant et la qualité de son travail qui doit s’attacher avant tout à la transmission du savoir certes, mais également à l’élévation de son niveau intellectuel qu’il doit sans cesse parfaire. La titularisation en France est un écueil difficile à franchir et le recrutement en Algérie sur la base d’un concours ne peut remplacer les écoles supérieures destinées à la formation des enseignants.

Voici survolée de manière non exhaustive, une réflexion sur le mal dont souffre l’école algérienne qui ressemble à un malade atteint d’une multitude de maladies que l’on peut résumer en quelques phrases :

  • L’enseignement de masse
  • Les infrastructures surchargées
  • L’encadrement pédagogique inadapté ou sous-qualifié
  • Les équipements insuffisants et obsolètes
  • Une documentation pédagogique et scientifique rarement disponible
  • L’indiscipline caractérisée installée en reine dans les établissements scolaires.

 Djamila Aït Ouazzou

Quand le pouvoir algérien fait pourrir la vie à la Kabylie

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Le pouvoir d’Alger a toujours occulté voir méprisé la région de Kabylie depuis l’indépendance à ce jour. La Kabylie a toujours été à l’avant-garde de toutes les révolutions, de Fatma n Summer à El-Mokrani, en passant par Amirouche à Abane.

Depuis l’indépendance, la Kabylie subit les affres d’un pouvoir machiavélique. 56 ans après, les projets sont quasiment nuls dans cette région, les infrastructures se comptent sur le bout des doigts.

Si on prenait à titre d’exemple ces 10 dernières années, tous les projets prévus en Kabylie sont soit, annulés ou reportés.  Les mêmes projets attribués à d’autres régions sont réceptionnés et mis en service, alors que la Kabylie est marginalisée. À Sidi Belabes à l’ouest, Sétif à l’est ou bien Ouargla au sud ont vu leurs lignes de TRAMWAY réalisées et mises en service alors qu’en Kabylie le projet a été carrément annulé. Le projet du téléphérique à Tizi Ouzou accuse un retard énorme alors que celui de Bejaia est complètement annulé.  Les exemples sont nombreux !

La pénétrante ou le tronçon autoroutier qui devrait relier Bejaia à l’autoroute Est-Ouest de 80 km dont les travaux ont démarré en 2013 avec un délai de réalisation initial de 36 mois n’a atteint que 45 % de réalisation en 5 ans, il faut encore attendre 5 autres années pour voir Bejaia ville kabyle se doter d’une autoroute. En plus du retard dans la réalisation, le projet, dont l’enveloppe initiale était de 192 milliards, vient d’être amputé de 50 milliards par le pouvoir d’Alger. L’entreprise chinoise chargée de la réalisation ne sait plus où se donner de la tête, puisque des factures de plusieurs milliards ne sont toujours pas honorées, les retards se répercutent automatiquement sur les délais de réalisation et sur la compression des effectifs.

Tous les projets structurants en Kabylie sont remis aux calendes grecques. L’exemple du dédoublement de la voie ferrée Bejaia-Alger est édifiant, À chaque fois qu’un ministre (ce qui est rare d’ailleurs) rend visite à Bejaia, il parle de ce projet, mais ce ne sont que des paroles dans l’air jusque-là, rien à l’horizon.

La Kabylie subit des attaques de partout, tout est fait pour affamer le peuple de Kabylie et l’obliger à supplier le pouvoir d’Alger. La Kabylie qu’on appelle région rebelle n’acceptera jamais le dictat du pouvoir d’Alger. La Kabylie est attaquée sur tous les fronts, économiquement, culturellement et même par le biais de la religion. Le salafisme monte en puissance en Kabylie, des mosquées sont construites à chaque coin du village le plus reculé par des personnes qui ramènent de l’argent d’où ? Personne ne le sait. La prostitution parle d’elle-même. En effet à Bejaia comme partout ailleurs en Kabylie, plus de 5000 prostituées venues des autres régions avec la bénédiction du pouvoir et de certains macs de la région. Ces femmes de mœurs légères polluent certains coins à l’image de Tichy, une station Balnéaire de renommée, mais devenue par la force des choses une ville de débauche.

La Kabylie n’a pas dit son dernier mot, jusque-là fait dans la résistance, jusqu’à quand ?

Personne n’est en mesure de répondre à la question.

A.Djenadi 

 

L’autisme politique

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Il n’est plus question d’idées (au moins celles compréhensibles par un cerveau normalement constitué), plus question de projets à construire (des routes, des centrales, des hôpitaux ou des vaisseaux intergalactiques), plus question de compétences (aura-t-on besoin d’un gestionnaire, d’un économiste, d’un sociologue, d’un capitaine affrontant la tempête), plus question de vertu (tous pourris paraît-il donc pourquoi en chercher un de vertueux ?), plus question de l’avenir de nos enfants, non, rien de tout cela.

Tout un chacun se prépare à reconduire le même raisonnement que la fois précédente, à reconduire le même système de pensée qui fabrique les clones dans ce pays. Le problème est que, lorsque je pense à l’approche des élections, non seulement le débat se résume à une guerre de positions sur des poncifs aussi vieux que le système politique algérien, mais les débatteurs acharnés se précipitent pour choisir un candidat, naguère médiocre et redevenu flamboyant par la magie d’une aliénation du jugement critique, et deviennent à leur tour autistes, incapables de disséquer rationnellement les propos et qualités des uns et des autres. Et pour preuve, il n’y a qu’à voir les élus des deux chambres pour vous donner une idée de la classe politique algérienne. Pauvre peuple !

Slimane Alem

Les Rifains et la fausse grâce du roi Mohammed VI

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Une mère d’un détenu politique rifain : « Ni les détenus ni leurs familles n’ont demandé à être graciés ! »

La grâce fut une « surprise » pour les familles et les détenus, malgré le soulagement d’avoir retrouvé leurs proches, il reste que « la majorité des détenus n’avait rien demandé ! »

À l’occasion de la fête religieuse du « sacrifice », le roi du Maroc Mohammed VI a gracié au total 188 personnes liées au mouvement de protestataire rifain.

Une mère d’un jeune détenu de 19 ans témoigne que son fils a été condamné, en 2017, à 18 mois de prison ferme, il devrait sortir en décembre 2018. Le 20 août 2018, (Révolution du Roi et du peuple) des documents de demande de grâce ont été proposés aux détenus, mais la majorité d’entre eux a refusé, estimant qu’ils étaient innocents des accusations pour lesquelles, ils étaient arrêtés et condamnés. De surcroît les peines d’emprisonnement de la plupart d’entre eux étaient quasiment écoulées. A contrario, ceux qui avaient demandé la grâce n’ont pas été relâchés !

La maman du jeune garçon, bien que soulagée d’avoir retrouvé son fils, affirme qu’il n’avait demandé aucune grâce, mais les autorités ont décidé pour lui : « On a ordonné à mon fils de prendre ses affaires et de ficher le camp ! « dit-elle.

Cette femme et son mari n’attendaient guère la libération de leur fils. La veille, elle avait fait quelques achats, qu’elle comptait ramener à son fils détenu à la prison de Taza. Le lendemain, vers midi, le père du jeune garçon a reçu un appel de son rejeton, lui annonçant qu’il venait d’être libéré !

Pour le jeune homme, la détention était une épreuve lourde de conséquences. Sa mère témoigne de la souffrance physique et psychologique de son fils depuis son retour à la maison.  Plusieurs signes montrent qu’il ne va pas bien. La maman décrit les symptômes d’un stress post-traumatique.  « Mon fils se sent étouffé, perdu, traumatisé… Il ne se sent nulle part en sécurité. Son visage a pris un teint jaune et il est constamment malade. Il fait des crises d’hystérie au point de déchirer ses vêtements ! Il n’arrête pas de répéter que la police marocaine et ses sbires sont une honte et qu’ils sont capables de tout ! Il supplie tout le temps sa mère de « Ne plus laisser son petit frère sortir seul ! » témoigne sa mère désemparée.

Ce témoignage accablant nous montre que le nombre de victimes de ce pouvoir tortionnaire ne cesse de s’accroître malgré les prétendues mesures de Clémence.  Tout le tapage médiatique qui a été fait autour de ces grâces n’est que grossières ficelles utilisées par le makhzen pour duper l’opinion et tenter d’inverser l’impression terriblement négative pour l’image du Maroc laissée par les lourdes sentences de juin 2018 contre les prévenus des « grands procès » de Casablanca.

Pour rappel, le noyau dur du « Hirak ».  53 personnes de ce mouvement populaire avaient été condamnés à des peines allant d’une année à et 20 ans de prison ferme. La sévérité du verdict avait suscité des réactions d’incompréhension et d’indignation sur les réseaux sociaux, suivies par quelques manifestations de protestation.


Notes:

 Au Maroc, la grâce fait partie des prérogatives du Souverain.  Elle peut porter sur une remise de peine, une grâce totale ou une annulation de peine. Elle peut concerner les peines de prison ou les amendes, ou encore les deux à la fois. Elle est valable pour les mis en cause déjà emprisonnés ou ceux se trouvant en état de liberté provisoire. Les demandes de grâce sont formulées soit par les mis en cause eux-mêmes, soit par leurs avocats, familles ou des ONG.

Pour statuer sur les demandes, une commission spéciale a été créée. Il s’agit d’un organe permanent relevant de la direction des affaires pénales et des grâces (ministère de la Justice). Il est présidé par son directeur et est composé de représentants :

  1. Du cabinet royal,
  2. De la Cour Suprême,
  3. Du parquet Général à la Cour Suprême
  4. De l’Administration pénitentiaire,
  5. La présence d’un magistrat de la défense.

Dans son travail, la commission des grâces se base sur les dossiers élaborés par les assistants sociaux des divers centres pénitentiaires du pays. Les demandes retenues par la commission sont par la suite transmises au Cabinet royal pour validation.

Rachid Oufkir

 

 

« Tanger la blanche » redessinée par la reconversion de son port

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Perchés sur l’impériale de l’énorme bus rouge qui frôle les façades historiques, les touristes découvrent le vieux Tanger, tandis qu’une foule de vacanciers se presse sur la nouvelle corniche : les grands chantiers de reconversion de la zone portuaire ont redessiné la ville blanche.

« C’est superbe… », s’extasie Michal Linsi Tang, un étudiant chinois de 19 ans, à bord du bus touristique qui sillonne depuis fin juillet la ville aimée de tant de peintres et d’écrivains, à la pointe de l’Afrique.

Le vieux port historique a été entièrement déblayé et réaménagé depuis l’ouverture en 2010 du nouveau pôle maritime de Tanger-Med, à une cinquantaine de kilomètres, où transitent désormais trois millions de conteneurs par an et presque autant de passagers.

Les poids lourds ont disparu du centre-ville, les artères ont été retracées, les fortifications militaires héritées de la colonisation portugaise rénovées, la forteresse nettoyée.

Un nouveau port de plaisance, « Tanja Marina Bay », avec dans un premier temps 600 anneaux et un espace de promenade, a été inauguré en juillet à proximité du port de pêche modernisé, au bout de la grande corniche piétonne qui encercle la baie et ouvre l’horizon sur l’Espagne, de l’autre côté de la Méditerranée.

« Tout a changé, on ne reconnaît plus rien », regrette Rachid, un sexagénaire natif de Tanger qui vit depuis 30 ans en France et revient chaque été.

Le méga-programme « Tanger-Métropole », lancé par le roi Mohammed VI en 2013 pour 7,6 milliards de dirhams d’investissements (environ 630 millions d’euros), dont près du quart alloué aux aménagements maritimes, a bouleversé la cité du Détroit, longtemps délaissée dans un Maroc en développement.

« Ville émotionnelle »

Désormais, le nombre de touristes ne cesse d’augmenter – même s’il reste bien moindre qu’à Marrakech ou Agadir – et les hôtels se multiplient.

Signe du développement touristique, la multinationale de transports Alsa, qui assure la gestion des bus urbains, vient de lancer deux circuits de visites en bus à impériale.

Celui du centre-ville emprunte des ruelles étroites, surpeuplées, souvent encombrées de voitures en stationnement interdit.

« Circuler là avec un bus de 4,4 mètres de haut, c’est une vraie aventure » et « monter ce projet a été sportif », confie Jose Ramon Fernandez, le directeur local d’Alsa.

Le circuit passe près de la « Bab Merican » (la « Porte « américaine ») du cimetière juif, du Grand théâtre Cervantes (un rendez-vous mondain incontournable jusqu’à sa fermeture en 1962), près du vieux marché aux poissons puis monte vers l’ancien consulat italien, où se réfugia en 1850 Garibaldi, le héros du « Risorgimento » (Renaissance) avant de gagner les quartiers modernes.

« Tout est mélangé ici, c’est une ville cosmopolite et hétérogène, une ville émotionnelle », s’emballe l’écrivain Farid Othman, qui a conçu les parcours touristiques.

Ce militant culturel hispano-marocain de 39 ans organise, depuis le lancement de ces grands bus rouges, des tournées gratuites pour les enfants de la ville « afin qu’ils apprennent à connaître la beauté de Tanger et à en prendre soin ».

Ibn Battûta, Paul Bowles, William Burrough, Truman Capote, Alexandre Dumas, Jean Genet, Joseph Kessel, Mohamed Choukri, Antoni Gaudi, Mick Jagger : Farid Othman connaît toutes les ombres célèbres qui hantent Tanger et « n’imagine pas vivre ailleurs ».

« Tanger a toujours attiré et inspiré des artistes et des écrivains du monde entier », relève Younes Cheik Ali, un commerçant féru d’art et considéré comme une mémoire locale.

Une de ses grandes fiertés : tenir un café littéraire dans une maison très ancienne de la vieille ville, immortalisée par le peintre français Eugène Delacroix avec « La noce juive au Maroc » (1841). Cet amateur d’art possède lui-même un petit Delacroix dans sa précieuse collection liée à l’histoire de Tanger.

Statut international Aux confluents de l’Atlantique et de la Méditerranée, la ville a été successivement phénicienne, romaine, arabo-musulmane, portugaise, espagnole, anglaise, puis sous statut international entre 1923 et 1956, avant son intégration au Maroc : Abdelaziz Alamai Taidi, un marchand, aime raconter l’Histoire à ses clients. Dans sa modeste boutique située en face du mausolée islamique qui a inspiré le peintre Henri Matisse, il vend des foulards marocains, des livres en anglais, des tableaux africains, des objets décoratifs de la tradition juive…

Tanger vit tournée vers l’Espagne, à moins d’une heure de bateau, mais un TGV attendu pour la fin de l’année la rapprochera bientôt de Rabat, la capitale.

Reste à aménager ses quartiers périphériques, qui ont proliféré au fil des ans et des mouvements de migrations, transformant la deuxième ville économique du Maroc en un étalement urbain chaotique d’environ un million d’habitants.

Vigilantes face à la convoitise des promoteurs, les associations de protection du patrimoine ont convaincu les autorités de préserver des monuments emblématiques comme le palais hispano-mauresque de l’écrivain-espion britannique Walter Burton Harris, en cours de rénovation, ou les vieilles arènes, en attente d’un projet de réhabilitation.

« Cette ville n’a cessé d’éprouver un dilemme entre son développement économique et démographique et la protection de son trésor environnemental et historique », souligne le dernier rapport de l’Observatoire de protection de l’environnement et des monuments historiques.

Les noctambules, eux, ont retrouvé leurs nuits blanches : en mode veille pendant les grands travaux, la fête a repris ses quartiers dans les boîtes de nuit lovées en contrebas de la nouvelle corniche et au sous-sol de la Marina.