La signature d’un partenariat franco-algérien pour rénover la Casbah d’Alger a provoqué une levée de boucliers. Pour ses opposants, la nomination de l’architecte français Jean Nouvel à la tête du projet constitue un affront à l’histoire algérienne.
La signature le 16 décembre d’un partenariat franco-algérien portant sur la rénovation de la casbah (citadelle) d’Alger suscite la polémique. Si le projet a suscité l’enthousiasme de la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse et de son homologue algérien, le wali (préfet) Abdelkader Zoukh, ce sentiment ne fait pas l’unanimité de part et d’autres de la Méditerranée. En cause : la nomination de l’architecte français de renommée internationale Jean Nouvel, pour superviser les travaux. Dans une lettre ouverte publiée le 20 décembre dans Libération, plus de 400 personnes, issues de différents milieux en Algérie, en France ou encore au Canada, lui ont font part de leur indignation.
« La Casbah, les Français l’ont déjà partiellement détruite trois fois »
«Nous sommes beaucoup à avoir été choqués en apprenant qu’une convention tripartite avait été signée entre la wilaya d’Alger et la Région Ile-de-France», écrivent en préambule les signataires. Et de poursuivre en invoquant les opérations d’aménagement menées à Alger durant la période coloniale française : «La Casbah, les Français l’ont déjà partiellement détruite trois fois. Suivant l’invasion de la Régence d’Alger en 1830, les officiers coloniaux avaient déjà bien compris le danger potentiel de son urbanisme insurrectionnel ; ils ont ainsi ordonné la destruction de toute la partie basse de la ville, privant ainsi la Casbah de son accès à la mer. Plus tard, les autorités coloniales y construiront des immeubles haussmanniens, reprenant les tactiques urbanistes contre-insurrectionnelles déjà appliquées à Paris et Marseille. A la fin des années 1930, lorsque les autorités coloniales ont fait « la guerre aux taudis » et ont ainsi détruit le quartier de la Marine.»
Selon ces signataires, «des projets qui n’auraient pas à cœur de servir en premier lieu ses habitants ainsi que le legs historique, politique et culturel de cette ville dans la ville, et qui leur préféreraient des ambitions touristiques ou financières, ne sont pas dignes de ce lieu de vie et d’histoire». Enfin, ils exhortent l’architecte français à se désister et à recommander à la wilaya d’Alger des architectes locaux «qui sauront problématiser ce projet de manière à préserver la Casbah».
De nombreux internautes algériens ont exprimé, sur les réseaux sociaux, une opposition similaire au projet franco-algérien de rénovation de la casbah. Certains ont fait valoir qu’il existait des architectes algériens capables de diriger un tel projet.
Un temps muette, la wilaya (préfecture) d’Alger a finalement répondu aux critiques en annonçant le 22 décembre dans un communiqué que le partenariat en question «portera[it] uniquement sur la revitalisation de la Casbah d’Alger», sans fournir plus d’explications. Elle a en outre précisé que «tous les frais liés aux prestations de Jean Nouvel ser[aient] pris en charge totalement par le Conseil régional d’Ile-de-France».
«Le rôle de cet architecte de renommée internationale sera d’accompagner la wilaya d’Alger et de lui fournir des idées et des conseils en matière de la revitalisation de la Casbah d’Alger, classée patrimoine mondial par l’UNESCO au mois de décembre 1992», a-t-elle enfin souligné.
Source RT France