Signée Sadki
Maroc : après leur condamnation à la prison ferme, Bioui et Hjira saisissent la Cour de cassation
JUSTICE – “Nous sommes très choqués par le verdict”, déclare au HuffPost Maroc Abdellatif Wahbi, député PAM et avocat de Abdenbi Bioui, membre du même parti, président du conseil de la région de l’Oriental, au lendemain de sa condamnation pour détournement de fonds publics. Dans cette région, le président de la commune d’Oujda, Omar Hjira, membre du bureau exécutif du parti de l’Istiqlal (PI), a lui aussi été reconnu coupable pour le même chef d’accusation auquel s’ajoute la falsification.
Le tribunal des crimes financiers de Fès a condamné, mercredi 20 mars, Bioui à un an de prison ferme et Hjira au double de cette peine. Mais l’exécution de ce verdict est suspendue automatiquement par la saisie de la Cour de cassation, comme l’explique Me Wahbi, rappelant que les condamnés ont dix jours à partir du verdict, conformément à la loi, pour faire appel à la plus haute juridiction.
Une nouvelle manche à laquelle l’avocat ne s’attendait pas. Et pour cause, les deux hommes avaient été acquittés dans le cadre de ce même dossier en 2017. “Le juge d’instruction avait décidé de ne pas engager de poursuite pour crimes financiers. Le parquet a alors renvoyé le dossier à la chambre criminelle près le tribunal de première instance, qui a prononcé un non lieu. Mais en appel, il nous ont condamnés. Moi, je n’y comprends plus rien!”, s’exclame l’avocat.
C’est le parquet qui avait fait appel du verdict de première instance en se basant sur le rapport de la Cour des comptes faisant état de dépenses injustifiées entre 2006 et 2009 et évaluées à 40 millions de dirhams pour des travaux d’aménagement. “Le procès en appel a pris environ un an et la plaidoirie du procureur n’était pas méchante. Cela avait même renforcé notre espoir”, confie Me Wahbi, estimant que le rapport de la cour des comptes “se base sur des estimations qui ne peuvent servir d’éléments catégoriques”.
L’avocat dit cependant garder espoir, d’autant que, pour lui, on ne peut engager la responsabilité de Bioui dans ce qui relève de l’exécutif sur terrain. “Il ne peut être pénalement responsable de l’exécution que doit assurer un ouvrier ou un fonctionnaire”, assure-t-il, remettant en question le verdict.
Impressions similaires au PI. L’un de ses leaders, Adil Benhamza, a exprimé son incompréhension de la condamnation de Omar Hjira sur sa page Facebook. Il a estimé que ce dernier ne pouvait être tenu pour responsable de faits qui remontent à une période où il n’a pris la tête de la commune qu’à sa fin (2009).
“C’est un rebondissement incompréhensible qu’à connu cette affaire. Nous soutenons notre camarade Hjira dans l’espoir que la justice se rattrape à l’étape de la cassation”, écrit-il. Et d’accuser la justice de “ne pas être indépendante ni intègre et de ne fonctionner que par voie d’instructions”.
Mais si pour les deux partis de l’opposition, PAM et PI, cette condamnation a eu l’effet d’un coup de massue, pour les associations, elle suscite tout au contraire un soulagement. Interrogé par le HuffPost Maroc, le président de l’Instance nationale de la protection des biens publics au Maroc, Mohamed Ghalloussi estime que “ce verdict relève d’un signe positif”. “Le jugement prononcé en appel a corrigé une situation inconcevable que représentait l’acquittement en première instance de ces deux hommes influents”, affirme-t-il.
Leur position et responsabilité partisane ont fait de ces deux condamnés une sorte de “symbole de la reddition des comptes”. “Nous avons tant milité pour que chaque responsable de la gestion publique soit appelé à rendre des comptes sur la base des rapports de la cour des comptes”, rappelle-t-il. Et d’espérer que ce verdict annonce “les prémices du combat contre le laisser-aller et la corruption”.
Plusieurs affaires liées à la dilapidation de deniers publics aboutissent presque toujours au non lieu sinon à des peines avec sursis, regrette Ghalloussi, citant, entre autres, Abdelaziz Banine du RNI et Ali Rahimi de l’UC. L’association avait déposé plainte contre “l’impunité des crimes financiers” auprès du conseil supérieur du pouvoir judiciaire et la présidence du ministère public. “Souvent ce sont de petits fonctionnaires et quelques présidents de communes rurales qui sont condamnés, mais ce verdict de Fès montre que la règle n’est pas générale”, estime Ghalloussi espérant que “la Cour de cassation ne fera l’objet d’aucune pression pour que la loi reste au dessus de tous”.
Venezuela : concert d’indignation après l’arrestation du bras droit de Guaido accusé de «terrorisme»
L’opposant vénézuélien Juan Guaido, président par intérim autoproclamé, a dénoncé une manœuvre «vile» et prévenu qu’il ne se laisserait pas intimider après l’arrestation de son chef de cabinet, vivement condamnée à l’étranger.
Juan Guaido, l’opposant vénézuélien qui s’est autoproclamé président du Venezuela avec le soutien de plusieurs pays occidentaux, a annoncé sur Twitter l’arrestation de son bras droit. «Ils ont arrêté Roberto Marrero, mon chef de cabinet, en l’accusant de détenir deux fusils et une grenade déposés (intentionnellement chez lui). L’arrestation s’est produite à 2h du matin environ», a-t-il fait savoir.
«Ils veulent m’intimider? Mais il ne peuvent pas aller tous nous chercher. Ils veulent venir me prendre? Qu’ils viennent, ils ne pourront nous dévier de la route que nous sommes en train de tracer» a déclaré à la presse Juan Guaido, qualifiant l’arrestation de Roberto Marrerro, âgé de 44 ans, de «vile» et «grossière». Celle-ci a été justifiée par le gouvernement pour des soupçons de «terrorisme».
Pour lui, le gouvernement de Nicolas Maduro essaie d’instiller «la peur» dans les rangs de l’opposition et expose sa «faiblesse» en agissant ainsi. Juan Guaido, président de l’Assemblée nationale dominée par l’opposition, avait lui-même été arrêté par les services de renseignement vénézuéliens (Sebin) le 13 janvier lors d’une opération spectaculaire en pleine autoroute, avant d’être relâché une heure après.
L’arrestation de Roberto Marrero a été aussitôt condamnée par le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo: «Nous appelons à sa libération immédiate. Ceux qui le retiennent devront rendre des comptes», a-t-il mis en garde via Twitter.
L’ONU a invité à «empêcher toute escalade» de la tension : «Nous renouvelons notre appel à ce que tous les acteurs au Venezuela prennent des mesures immédiates pour apaiser les tensions», a déclaré un porte-parole à New York.
L’Union européenne a également appelé à une «libération immédiate et inconditionnelle» de l’opposant. Et la France a également insisté sur «l’arrêt de la répression contre l’opposition au régime de Nicolas Maduro» alors que les organisations de défense des droits de l’Homme dénoncent régulièrement les arrestations et détentions dans le pays.
Le 23 janvier, Donald Trump avait apporté son soutien au président de l’Assemblée nationale et chef de l’opposition vénézuélienne après que ce dernier s’était autoproclamé «président par intérim» du pays, quelques jours après l’investiture du président du Venezuela Nicolas Maduro, réélu pour un second mandat. Les alliés de Washington dans la région lui avaient alors emboîté le pas à l’instar de l’Argentine, du Canada, du Chili, de la Colombie ou encore du Pérou.
Source RT France
Le peuple rejette les propositions de Bouteflika «Non c’est non !»
Bouteflika est toujours président jusqu’à l’élection de son successeur. C’est dit et c’est confirmé.
Il ne quittera point El Mouradia ce 28 avril comme le stipule la Constitution. Seul nouvel élément annoncé depuis sa déclaration du 11 mars dernier, «la conférence nationale sera tenue dans un avenir très proche», précise celui qui a rédigé le communiqué de la présidence. Ses membres auront pour mission de réformer le système et de modifier la Constitution. Sauf que le peuple parle d’autre chose. Les millions de manifestants des quatre coins du pays exigent «le départ de tout le système». Certes, il se pourrait que la marche d’aujourd’hui se tienne dans des conditions météorologiques un peu particulières. Il pleuvra probablement toute la journée.
Mais cela n’a pas l’air de décourager les algériens qui ont déjà inventé le nouveau slogan de la marche du dernier mot : «Yetnahaw Ga3» (qu’ils partent tous), la fameuse phrase du jeune Algérois qui est intervenu spontanément dans un direct de la chaîne SkyNews le jour de l’annonce du retrait de Bouteflika et l’annulation de l’élection présidentielle sera scandé dans toute l’Algérie.
Les soutiens du pouvoir démissionnent les uns après les autres. Tout le monde déclare rejoindre le mouvement populaire, y compris le patron du FCE et les partis de l’alliance présidentielle, dont le FLN et le RND. Mais cela n’a pas l’air d’intéresser les Algériens qui les appellent plutôt à descendre avec le peuple sur le terrain afin de manifester publiquement leur position du rejet du système auquel ils appartiennent. Les vidéos se multiplient sur les réseaux sociaux, notamment depuis hier.
Les internautes appellent au pacifisme afin de maintenir la cadence de la pression contre le pouvoir. D’autres expliquent comment protéger les pancartes en cas de pluie. C’est le cas du chanteur Amazigh Kateb, qui dans un direct sur sa page Facebook a expliqué, entre autres, qu’il faut les protéger soit à l’aide de cellophane ou de scotch, mais pas que. Il a aussi adressé un message aux manifestants quant à la marche d’aujourd’hui et sur l’adhésion des partis au pouvoir et ceux de l’opposition au mouvement populaire.
«A partir de demain, nous n’avons plus de revendications. Nous n’avons que nos exigences», affirme-t-il. Et d’ajouter : «Ils doivent nous rendre la démocratie en tant que citoyens à travers des assemblées constituantes. Personne ne volera cette démarche qui est celle du peuple. Celui qui dit qu’il est avec le mouvement voulait dire qu’il n’y était pas. C’est trop facile de dire : je suis avec ! Il faut dire : je suis dedans ! Je ne crois pas à ces partis. Cette résistance est celle du peuple. Ne vous laissez pas abuser», insiste-t-il.
Source El Watan
Par Meziane Abane
Algérie : cette opposition qui court après les jeunes
De l’islamiste Djaballah à la trotskiste Hanoune, ils cherchent désespérément à coller au mouvement populaire qui fait vaciller le pouvoir du président Abdelaziz Bouteflika.
Les partis de l’opposition algérienne, toutes tendances confondues, seront dans la rue ce vendredi parmi les manifestants. Mais pas en tant que partis : leurs dirigeants et leurs sympathisants y prendront part à titre individuel et défileront sous des mots d’ordre et des slogans comme « Le 22 mars, la marche de la chute » qui ne sont pas les leurs. Autrement, ils ne seront pas acceptés. L’islamiste dit modéré Abdellah Djaballah, chef du Parti justice et liberté (PJL), la dirigeante trotskiste Louisa Hanoune, même l’ex-premier ministre Ali Benflis, qui fait figure d’opposant numéro un, et d’autres dirigeants des partis siégeant à l’Assemblée nationale populaire et au Sénat en savent quelque chose : ils ont été sifflés, voire contraints de quitter la manifestation populaire, ces dernières semaines.
Cela ne les a pourtant pas empêchés de se réunir à maintes reprises pour définir une stratégie commune face à un président qui refuse de partir. Ou d’aller chacun de leur côté avec leur propre feuille de route de sortie de crise, de crainte que le mouvement populaire, qui a une longueur de distance sur eux, ne creuse davantage l’écart. Et pour ce faire, ils n’ont pas hésité à embarquer dans leurs wagons Kamel Guemazi et Abdelkader Boukhamkham, deux membres fondateurs de l’ex-Front islamique du salut (FIS, dissous en 1992, à l’origine de la guerre civile des années 1990), escomptant sans doute entraîner ce qu’il reste de la base islamiste radicale convertie opportunément et tactiquement à la démocratie pluraliste.
Personne ne veut d’un scénario égyptien ou tunisien
Outre la photo des dirigeants de cette opposition en train de faire la prière conduite par Kamel Guemazi, qui a fait le tour des réseaux sociaux, c’est cette « plateforme pour le changement en Algérie », signée par Mustapha Bouchachi, ex-président de la LDH (droits de l’homme), député et membre du FFS (social-démocrate), Karim Tabou (ancien dirigeant du même FFS), Mohcine Belabbas (RCD, centre gauche)… et deux dirigeants de l’ex-FIS, Guemazi et Mourad Dhina, lequel avait ouvertement assumé l’assassinat des intellectuels algériens durant les années 1990, qui fait désordre : ces opposants sont accusés de se poser en tuteurs d’un mouvement qu’ils ont pris en cours de route. Au point que Karim Tabou a affirmé sans rire qu’il avait signé un texte où ne figurait aucun nom, tandis que M. Bouchachi jure la main sur le cœur qu’il ne l’a jamais signé.
Discrets jusque-là, les anciens de l’ex-FIS sont sur la brèche : ils vont tenter dès ce vendredi d’investir le mouvement populaire et pourquoi pas tenter de le détourner à leur profit. Sur les réseaux sociaux, les mises en garde ne manquent pas : personne ne veut d’une réédition des scénarios égyptien ou tunisien, qui avaient vu les islamistes prendre en retard le train populaire avant d’en prendre la direction, d’autant qu’ils disposent grâce à l’appui des pays du Golfe d’importants moyens financiers et médiatiques. Et l’Algérie n’échappe pas à ce cas de figure. Vigilance donc.
Tout ce beau monde qui cherche à parrainer le mouvement populaire s’agite comme si ces millions de jeunes qui manifestent, et pas seulement le vendredi, et qui sont en train de réinventer la politique n’étaient pas porteurs d’une autre idée de l’Algérie. Certes, tous louent leur degré de civisme et leur maturité, mais dans le style « toi le jeune, pousse-toi que je m’y mette », « la récré est finie, rentrez à la maison », « laissez les adultes finir le boulot ».
Or, le talon d’Achille de ce personnel politique pris de court par les événements actuels réside dans le fait qu’il est constitué de partis sans base populaire. Aux dernières élections législatives de mai 2017, où le taux de participation était de 35 % (8,2 millions d’électeurs sur 23 millions), les partis de l’opposition, y compris les islamistes dits modérés, ont récolté moins de 1,5 million de voix et moins de 70 sièges sur les 462 en lice. C’est dire (1).
Qui plus est, en participant à des élections jouées d’avance qui ont permis au pouvoir politique de se prévaloir d’une façade démocratique et pseudo-pluraliste, ils ont perdu toute crédibilité auprès de cette jeunesse algérienne majoritaire démographiquement. Quant à l’ancien FIS, personne n’a oublié les 100 000 morts des années 1990.
Par H.Zerrouky
Algérie : Ramtane Lamamra est à Genève
Genève. Ramtane Lamamra a atterri mercredi soir à Cointrin à bord d’un jet du gouvernement.
Le vice-premier ministre et ministre des affaires étrangères algérien, Ramtane Lamamra, est à Genève. L’ancien commissaire à la Paix et à la sécurité de l’Union africaine a été nommé à ses fonctions le 13 mars dernier, après le retrait d’Abdelaziz Bouteflika à l’élection présidentielle en Algérie. L’avion de Ramtane Lamamra s’est posé un peu avant 20 h à Cointrin mercredi soir, il venait de Berlin.
Alger a lancé le 18 mars une opération diplomatique, en Italie, en Russie, en Allemagne et en Chine. Cette mission destinée à «rassurer les partenaires extérieurs de l’Algérie» a été confiée à Ramtane Lamamra.
Mercredi à Berlin, le nouvel homme fort a réaffirmé que le président Bouteflika ne cédera le pouvoir qu’après l’élection d’un nouveau président suite à la conférence nationale de consensus et l’élaboration d’une nouvelle constitution, rapporte l’agence Reuters.
Le 19 mars, Ramtane Lamamra faisait escale à Moscou, où il a rencontré son homologue russe, Sergueï Lavrov, en quête de soutien dans le cadre des protestations en Algérie. Le nouveau ministre algérien a porté une lettre de son président à Vladimir Poutine, dont il n’a pas révélé le contenu. Des propos rassurants quant à la situation en Algérie ont été tenus.
La veille, en Italie, discours similaire. L’Italie serait le premier partenaire européen de l’Algérie en matière d’échanges commerciaux et le premier client du gaz algérien.
La feuille de route de Ramtane Lamamra prévoyait, selon les médias, un voyage en Chine suite à son escale en Allemagne. Mais c’est pourtant bien à Cointrin que son avion – un Gulfstream 4SP similaire à celui qui avait amené le président Bouteflika à Genève le mois dernier – s’est posé hier soir. Ce jeudi matin, il est encore posé à Genève Aéroport.
Source 24Heures
Karim Tabbou: « Il est clair aujourd’hui que le pouvoir est la seule main de l’étranger en Algérie » (Entretien)
« L’Algérie fournit son gaz gratuitement à la France » : Ce qu’il en est réellement
Depuis quelques jours, une rumeur répandue sur les réseaux sociaux fait état d’un accord entre l’Algérie et la France sur la livraison gratuite de gaz. Cependant, cette information ne repose sur aucun fondement, et c’est ce qu’a affirmé l’expert en énergie Mourad Preure lors de son passage, hier mercredi, à la Radio Chaîne 3.
Au sujet de ces contrats gaziers avec la France, qui importe 10% de son pétrole et de son gaz d’Algérie, Mourad Preure est catégorique :
« l’Algérie ne donne pas gratuitement le gaz. Ce n’est pas possible ». « Pour que le gaz quitte les frontières, il doit passer par les douanes algériennes », a-t-il assuré.
« Si vous exportez un conteneur de dattes, il faut que les douanes mettent leur cachet, sinon, il ne sort pas. De la même manière, un méthanier qui transporte le gaz ne sortira pas sans l’autorisation des douanes », a-t-il ajouté.
Selon plusieurs observateurs, cette rumeur est destinée à alimenter le sentiment antifrançais présent chez les Algériens, d’autant plus qu’aucun texte ni aucune preuve ne sont présentés pour donner de la crédibilité à cette information qui ne cesse de fuser sur les réseaux sociaux.
Par ailleurs, l’expert a aussi expliqué que « lorsqu’un bateau transportant du pétrole quitte l’Algérie, la Banque d’Algérie exige à ce que les recettes soient rapatriées dans un délai très court ».
Bajolet : “La corruption a touché la famille de Bouteflika”
L’EX-AMBASSADEUR DE FRANCE À ALGER RÉVÈLE DANS SON LIVRE
“La demi-douzaine d’hommes d’affaires que l’on présentait comme tels étaient plutôt des capitalistes d’État, voire des affairistes, liés aux services ou au pouvoir, qu’ils contribuaient à corrompre”, a indiqué cet ex-diplomate.
L’ex-ambassadeur de France en Algérie (2006-2008), Bernard Bajolet, qui avait révélé sur les colonnes du quotidien Le Figaro que le président Bouteflika “est maintenu en vie artificiellement”, vient de jeter un autre pavé dans la mare dans son dernier livre Le soleil ne se lève plus à l’Est : mémoires d’un ambassadeur peu diplomate (Éditions Plon), où il revient sur son passage à Alger en tant que chef de la mission diplomatique française. Abordant la situation économique du pays, M. Bajolet s’est dit impressionné par l’ampleur de la corruption en Algérie. “Je fus pris de vertige par les sommets que la corruption avait atteints, touchant jusqu’à la famille du chef de l’État”, a écrit l’auteur, qui explique comment le privé algérien a été écarté dans la prise de décision. Enfonçant le clou, M. Bajolet dira qu’“il n’y avait pas non plus en Algérie de grands capitalistes prêts à investir massivement dans le pays”. “La demi-douzaine d’hommes d’affaires que l’on présentait comme tels étaient plutôt des capitalistes d’État, voire des affairistes, liés aux services ou au pouvoir, qu’ils contribuaient à corrompre”, assène le diplomate. Selon lui, “il aurait fallu pousser le secteur privé, seul moteur de croissance”. “Mais, déplore-t-il, le pouvoir, de toute évidence, ne le voulait pas, comme s’il craignait l’émergence d’une classe d’entrepreneurs qui aurait pu un jour le contester et exiger un partage de la décision. Ainsi, je découvris un tissu, encore embryonnaire, de PME dynamiques. Mais le gouvernement ne l’aidait pas à se développer, et Bouteflika lui-même m’avoua un jour qu’il n’y croyait pas.” Pour M. Bajolet, “l’Algérie venait à peine de se libérer de dix ans de terrorisme. Elle avait perdu beaucoup de temps, et l’administration qui la dirigeait n’était pas de nature à le lui faire rattraper : les ministères s’étaient vidés d’une grande partie de leurs cadres de qualité et, au fond, l’État se résumait pratiquement à l’armée, véritable ossature du pays, et à Sonatrach. Le processus de décision paraissait grippé, le système de représentation en panne”. Raison pour laquelle, explique-t-il encore, “l’Algérie n’a pas réussi la diversification économique et la remise à niveau des équipements publics a eu un effet limité sur l’économie”. Selon Bajolet, le président Bouteflika n’appréciait pas que “le président Chirac ne se cachait pas d’entretenir des relations quasiment familiales avec le roi du Maroc (…) On nous a parlé de relations privilégiées avec l’Algérie, se plaignit Bouteflika. Mais en réalité, les privilèges ont été réservés au Maroc et à la Tunisie. L’Algérie, elle, n’a rien vu”. Autre sujet abordé, et pas des moindres, l’arrêt du processus électoral en 1992 en Algérie, après la victoire du FIS, et qui ne constituait, selon lui, qu’une hypothèse au sein du Comité interministériel du renseignement (CIR). Selon l’ex-patron de la DGSE, “si le FIS prenait le pouvoir en Algérie, il ne le rendrait pas. Sa victoire risquerait de provoquer une émigration massive vers la France (…) Si, au contraire, on le lui laissait, il devrait se montrer pragmatique et compter avec la France. Il évoluerait vers plus de modération”. Il révélera que François Mitterrand avait tranché afin que “les dirigeants algériens renouent le fil de la démocratisation”. Selon M. Bajolet, Mitterrand dit avoir regretté, a posteriori, le fait de n’avoir pas donné sa chance à Mohamed Boudiaf, figure emblématique de la Révolution algérienne et homme intègre, que la junte militaire avait rappelé de son exil.
FARID BELGACEM
Source : Liberté
Diabolisation des figures de l’opposition pour ternir le mouvement citoyen
Mustapha Bouchachi, Karim Tabbou et Zoubida Assoul sont au centre d’une polémique et d’une campagne de dénigrement violentes. Leurs noms se retrouvent sur la liste des signataires d’une plateforme pour le changement aux côtés d’anciens dirigeants du Front islamique du salut (FIS) Mourad Dhina et Kamel Guemazi.
Cette campagne n’aurait pour objectif que d’invectiver et calomnier ces personnalités connues pour leurs engagements démocratiques. Ils sont accusés de faire la promotion des obscurantistes et de composer avec des islamistes responsables de la décennie noire. Les trois personnalités ont vite démenti leurs implications avec les islamistes. Bouchachi et Assoul démentent avoir signé ce document, même si la plateforme reste intéressante, de leurs points de vue. Quant à Karim Tabbou, il déclare avoir joint son nom sans connaitre les signataires.
Les trois personnalités sont présentées comme des alliés des islamistes, ou comme promoteur du retour du FIS dissous. Ceux-là ont par ailleurs toujours été des militants pour la démocratie et pour les libertés individuelles et collectives.
Quelles sont les raisons de cette compagne de dénigrement ?
Cette compagne vient à un moment où ces figures commencent à faire le consensus dans la société civile. Elle est vraisemblablement orchestrée par des cercles que l’engagement et l’aura que dégagent ces personnalités dérangent.
Elle arrive dans un contexte où le pouvoir en place prépare une conférence d’entente nationale. Il aurait instruit les walis pour recruter des jeunes issus des organisations satellitaires qui seront perçus comme « représentants des manifestants ».
Des dizaines d’associations, financées par le régime, se sont réunies à Sidi-Fredj pour lancer « le dialogue national ». Cette campagne ne vise-t-elle pas à fabriquer des interlocuteurs, parallèlement à une campagne de discrédit de ces personnalités qui est actuellement en œuvre ?
Ces attaques visent notamment à éviter que des personnalités politiques, issues de l’opposition, n’émergent. Le but ne serait-il pas de laisser la rue sans représentation et de présenter le pouvoir comme seule alternative ?
Une chose est sure : le timing et les moyens utilisés pour s’attaquer à ces personnalités obéissent à une stratégie qui a pour objectif de les mettre hors course pour les prochaines échéances électorales. Associer leurs noms à ceux de personnalités islamistes répond à la volonté de les assimiler à leur projet obscurantiste, tout en faisant peur aux Algériens qui ont toujours en eux le pénible souvenir de la décennie noire.