À un mois des élections présidentielles en Algérie, les scénarios dignes de films hollywoodiens se multiplient. En un temps record, les services de sécurité, la justice et la presse nous ont servi trois récits aussi farfelus qu’ubuesque. Quelle est donc la raison derrière cet enchaînement de complots, d’intrigues et de machinations visant non pas le pays et ses institutions, mais une seule personne : l’homme providentiel, le prétendu sauveur de l’Algérie ? Selon ses nombreux partisans, l’Algérie, sans Abdelmadjid Tebboune, pourrait s’effondrer en quelques jours. Sommes-nous revenus à l’époque de la propagande communiste ? Et pourquoi précisément ce timing ?
Pour mieux comprendre, revenons d’abord sur les trois prétendus « complots » et tentons de les décortiquer un par un. Car si certains segments de la société algérienne sont prompts à croire ces récits sans le moindre fondement ni preuve, d’autres restent, pour le moins, perplexes et dubitatifs face à de tels scenarii.
Episode 3 : Le Maroc et son réseau d’espions
Deux jours seulement après son lancement, le complot « Star six » ne représentait plus rien pour les Algériens. Ce n’étais plus suffisamment drôle pour faire le buzz ou susciter les mèmes et autres formes de moqueries sur les réseaux sociaux, et loin d’être crédible pour intéresser certains citoyens qui veulent, tant bien que mal, croire en la propagande et aux manœuvres du pouvoir algérien. Ce rapide désintérêt qu’ont suscité les affaires « armes introduites par le MAK à partir du port de Béjaïa » et « Star six », ont obligé les scénaristes du centre principal des opérations (CPO) de la sécurité intérieure (dite caserne Antar) à accélérer la production du troisième épisode de cette série B, de très mauvais goût. Ainsi, suite à l’arrestation d’un Marocain entré d’une façon illégale sur le territoire algérien, les « limiers » du CTRI de Tlemcen, avec l’aide de leurs collègues de la deuxième région militaire, ont dû rapidement et dans la précipitation, créer une nouvelle histoire, pas moins ubuesque que les deux précédentes. Le 1er septembre, trois jours après la publication de « Star six », le juge d’instruction près le tribunal de Tlemcen a ordonné le placement en détention préventive de sept individus, dont quatre marocains, pour « constitution d’un réseau d’espionnage et de renseignement, en vue de porter atteinte à la sûreté de l’Etat ». C’est du moins ce qu’avait annoncé Mustapha Loubar, le procureur de la République près le tribunal de Tlemcen.
Il ne se passe pratiquement aucune semaine sans que des ressortissants marocains en situation irrégulière ne soient arrêtés dans cette wilaya frontalière qu’est Tlemcen. Les alliances entre les familles de cette wilaya et celles des villes de l’Est marocain sont nombreuses et l’unique moyen de transport est l’avion avec escale en Tunisie, alors qu’il est plus facile et surtout moins cher de passer par voie terrestre. De plus, les opportunités de travail en Algérie, dans le domaine du BTP, sont plus intéressantes et attirent beaucoup de marocains qui souffrent de la pauvreté. Ceci explique le recours de certains d’entre eux à des méthodes illégales pour entrer en Algérie. Les arrestations de ce genre ne font, d’habitude, l’objet de communiqués de la part de la Justice. Poussés par une conjoncture particulière et pressés par leur hiérarchie de produire un scénario susceptible de terroriser les Algériens et de les convaincre d’aller massivement aux urnes samedi 7 septembre, les disciples de Nacer El Djen n’ont trouvé que cette affaire à instrumentaliser. Pourquoi pas du moment qu’il y avait des ressortissants de l’ennemi numéro 1 de l’Algérie : le Maroc. Le scénario pouvait convaincre. C’est du moins ce que croyais les apprentis sorciers de Antar. Finalement, il n’en était rien. Le troisième épisode était un big flop, encore plus raté que les deux précédents. D’ailleurs, peu de personnes en ont entendu parler. Sur la presse écrite, l’événement a complètement été occulté, à cause d’un mauvais timing de publication. L’agence de presse officielle APS avait publié la dépêche un peu trop tard dans la journée du dimanche 1er septembre, et la majorité des journaux avaient déjà bouclé leurs éditions.
Pourquoi tant de propagande ?
Tout le monde connait l’issue des prochaines élections : Abdelmadjid Tebboune va rempiler pour second mandat avec plus de 70% ou 80% des suffrages exprimés. Alors, pourquoi autant de propagandes en un temps si court ? L’enjeu de ces élections n’est pas de savoir qui sera le vainqueur, mais plutôt d’avoir un taux de participation plus important que les scrutins post-Hirak, afin de donner un semblant de légitimité à l’actuel locataire d’El Mouradia. Pour y arriver, tous les moyens sont bons, y compris terroriser les citoyens algériens avec des fake-news et des histoires à dormir debout. Mais la campagne électorale censée pousser un maximum d’Algériens vers les urnes avait commencé, il plus de 18 mois avec l’achat de la paix sociale, notamment en créant une allocation chômage et en augmentant les salaires et pensions de retraites. Cela va-t-il suffire pour convaincre les algériens de participer massivement à une énième mascarade électorale ? Wait and see …