Au moment où le pays entier se lève pour rejeter l’élection présidentielle et exiger le départ du système, les décideurs, eux, s’emploient à trouver subterfuges et artifices pour contourner la volonté populaire.
Cette attitude irresponsable est sidérante. Elle est par ailleurs dangereuse car susceptible de conduire droit à une situation conflictuelle inextricable.
Le dernier communiqué de la présidence est une insulte à la Nation. Les décideurs persistent dans le déni de la réalité et de la nécessité et s’enfoncent dans la déraison.
La feuille de route proposée par Bouteflika reprend avec de légères modifications le contenu de sa lettre du 3 mars. Elle ne correspond en aucune façon aux exigences de la rue algérienne.
Dans son communiqué du 11 mars, Bouteflika mobilise les pires procédés de manipulation des masses. Il recourt jusqu’au mensonge en affirmant n’avoir jamais envisagé de se présenter pour un 5ème mandat. Nous sommes en plein dans le tragi-comique.
Seulement, son obsession à demeurer à la fois l’architecte en chef, le maître des horloges, le directeur du personnel et le conducteur des travaux dévoile la supercherie et la grossièreté de la manœuvre. C’est la plus grande ruse de l’histoire. La plus ignoble aussi.
La démarche de Bouteflika répond à un seul impératif : celui de sauver le système. Il renonce à la candidature sans renoncer à la présidence, il nomme le chargé de la fraude et de la répression comme premier ministre et rameute le vieux Lakhdar Brahimi pour présider une curieuse conférence outrageusement qualifiée d’instance indépendante.
Instrument des dictatures africaines par excellence, la conférence nationale s’est partout révélée inapte à produire le changement. Arène du défoulement et du délire, ce type de conclave n’a jamais été au-delà du palabre. Au final la décision reste l’otage des méandres obscurs et des coulisses puantes des systèmes autoritaires. Le pays a déjà eu à expérimenter ce genre de spectacle en 1994. Nul besoin d’en faire le bilan, le résultat est là.
Comme par le passé, le pouvoir ne résistera pas à la tentation de recourir à ses anciens réflexes afin de s’assurer le contrôle strict de ladite conférence: le dosage, le noyautage, le chantage et le pourcentage. Son principal objectif est de légitimer la prolongation de mandat pour Bouteflika.
Il est d’ores et déjà possible de deviner l’envahissement programmé de cette rencontre par une collection de mercenaires et de clientèles du système comme le FLN, le RND, l’UGTA, l’UNPA, l’UNFA, l’UNJA, la FAF, le FCE et pourquoi pas Madani Mezrag puisque le pouvoir lui a décerné le titre de personnalité nationale.
La conférence projetée est une tentative de redéploiement du système par le bruit, le nombre et l’illusion de la diversité. Le brouhaha est la manière la plus astucieuse de se poser en garant exclusif de l’ordre et de la stabilité.
Cette démarche est scandaleuse. Elle doit dénoncée et rejetée avec force. Le mouvement populaire doit se poursuivre et s’intensifier à travers les marches pacifiques sur l’ensemble du territoire national.
Bouteflika doit partir une fois arrivé au terme de son mandat, c’est-à-dire le 26 avril. C’est le début de la période de transition. Il n y a rien à négocier excepté les modalités pratiques du passage de l’ordre ancien à l’ordre nouveau.
Bouteflika, ses alliés et ses protecteurs ne peuvent prétendre à un quelconque rôle politique.
L’institution militaire jouit encore du respect des citoyennes et des citoyens. Elle constitue le seul interlocuteur valable de l’Etat.
Dans le dernier éditorial de la revue El Djeich, il est écrit que l’ANP et le peuple algérien partagent la même vision de l’avenir du pays. Ce propos est très rassurant. Il reste juste à le traduire par des actes concrets.
Par Djamel Zenati