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dimanche 13 octobre 2024
MémoireLe 14 juin 2001, L’espoir détourné de l’Algérie .

Le 14 juin 2001, L’espoir détourné de l’Algérie .

Une journée fut inscrite au registre de l’Histoire triste de l’Algérie. Tout est parti d’une injustice commise contre des jeunes collégiens et un lycéen. Le 19 avril 2001, la gendarmerie d’Ath-Douala a atteint Guermah Massinissa d’une rafale de mitraillette et en même temps, du côté Oued-Amizour trois élèves d’un CEM ont été interpellés devant leur professeur. Des gestes vils et volontaires qui ont mis toute une région en émoi. La douleur s’empara de la Kabylie : de Tizi-Ouzou à Bejaia, la population est en révolte contre un pouvoir despotique. Malheureusement, la réaction du pouvoir est violente, d’autres victimes s’ajoutèrent pour atteindre 130 morts et avec plus de 5 000 blessés.

Un moment rempli d’acrimonie, le pouvoir est assassin.

Zerhouni, ministre de l’Intérieur, agent des services, avec mépris et à mauvais escient, traita Guermah Massinissa “de Mohammed un voyou de 27 ans”. Bouteflika le Chef d’État, une partie de l’Algérie est dans un brasier, lui préféra aller en voyage diplomatique en Côte d’Ivoire. Ali Benflis, Chef du gouvernement, des jeunes, abruptement, sont assassinés sous les balles de la gendarmerie, sans faire preuve de mansuétude, préférant ne rien faire. Voilà, en résumé, comment le personnel politique du sommet de l’État a géré la crise.  

Il faut le rappeler, Bouteflika a toujours eu le complexe envers la région Kabyle. Sachant sa force de ses habitants lors de la révolution, il a toujours été si petit en parlant d’Abane, d’Amirocuhe ou de Krim. En décembre 1999, à Tizi-Ouzou, implacable, il martelait : “Je suis venu dégonfler votre ballon de baudruche (…) Tamazight ne sera jamais langue officielle et si elle devait devenir ne serait-ce que langue nationale, c’est tout le peuple algérien qui doit se prononcer par voie référendaire “.

Dans le même sillage du président, une certaine classe politique à caractère belliqueux, connue pour ses préférences en matière de soutien aux causes étrangères et particulièrement palestiniennes, s’enhardit à faire de l’apologie de la haine en incitant les autorités à intervenir militairement dans cette partie d’Algérie.

Malheureusement, le 14 juin 2001, fut un tournant décisif au profit de la dictature algérienne. Des millions d’Algériens ont été refoulés d’Alger avec des méthodes staliniennes. De la propagande, des arrestations arbitraires, traitement médiatique et menaces pour faire échouer la marche historique. Des prisonniers ont été libérés la veille par les sbires de Zerhouni pour attaquer des manifestants à coup de machettes et de sabres. Dans un scénario hollywoodien, une équipe de télévision de l’État filme des manifestants arrêtés avec des armes blanches et d’autres objets tranchants. La journaliste de l’ENTV, sous la direction de Hamaroui Habib Chaouki, après avoir félicité «les prisonniers» qui ont sauvé la capitale des manifestants, elle affirma aux téléspectateurs que vers la fin de la journée, «les manifestants sont retournés d’où ils sont venus».

Le système vient d’être sauvé, et l’espoir vient d’être détourné. Des familles endeuillées, et une région sombra dans l’isolement total. 

Les faits sont connus de tous, rien ne peut être oublié. Les parents des enfants morts sous les balles d’un corps de sécurité de l’État sont meurtris. Ni la commission du professeur Issad qui a accablé le pouvoir de n’avoir mis aucun effort pour arrêter l’effusion de sang et ni la compromission d’un groupe de mercenaires conduite par Abrika pour négocier avec Ouyahia n’ont pu calmer leur douleur.

Tout compte fait, pour le respect de la mémoire des victimes du printemps noir, il est plus qu’un devoir de lutter contre l’oubli, les commanditaires de ces tueries doivent être jugés. Un crime n’est jamais pardonné.

Depuis, une chape de plomb qui s’abat sur la Kabylie, les relations politiques ont beaucoup changé. Elles furent entièrement détériorées. Les responsables de la débâcle sont identifiés et cités par l’opinion publique et non par la justice. En premier Bouteflika, lors de sa deuxième campagne (2004), il vociféra à Vgayet, où il fut accueilli avec des jets de pierres, en disant au sujet des kabyles : «De loin,  je vous voyais comme des géants. En arrivant ici, je vois que vous n’êtes que des nains». Et le reste, l’Histoire est en train de s’écrire, inévitablement, elle jugera ceux qui ont contribué de prêt ou de loin à martyriser et à diaboliser la Kabylie et ses enfants.

Entre temps, un travail tendancieux et de scission est entretenu avec le reste des régions d’Algérie. Le kabyle est devenu l’ennemi numéro à abattre. Ne disposant pas de moyen médiatique pour rectifier l’image et expliquer aux autres que la révolte nous concerne tous, la plate-forme d’El-Kseur est une revendication nationale et non régionale. Dommage, à l’époque, les réseaux sociaux ne sont pas encore si développés comme aujourd’hui afin de démentir.

Il a fallu attendre 18 ans pour que le message arrive à destination, une prise de conscience a gagné du terrain. Le 16 février 2019, de Kharrata en Kabylie que les choses ont été reprises. Les Algériens ont compris qu’ils étaient dupés. Finalement, tout le monde est concerné, la “kabylisation” de l’Algérie est un fait incontestable.

Aujourd’hui, une espérance est née pour en finir avec un système qui refuse de partir sans faire des victimes. C’est une question de temps pour aboutir, au bout de presque cinq mois de révolte, de manifestation et de mobilisation, l’algérien a brisé des tabous et défié la peur qui régna pendant 62 ans. Le peuple est en train de s’instruire politiquement, il a compris que son destin ne dépend que de lui même.

Toutes les tentatives d’avilir la société algérienne furent vaines. Ils ont tout essayé. Visiblement sur le terrain, les services de sécurité qui font du zèle pour intimider chaque mardi l’étudiant en particulier et vendredi le citoyen en général, des agissements qui ne font que renforcer un sentiment réactionnaire pacifique prouvent que le régime a tendance militaire est en mode panique.

Le nouveau maitre des lieux, le général Gaid Salah, sur les pas de Bouteflika, menace les Algériens à la manière de militaire. Sous son règne que Kameleddine Fekhar est décédé dans des conditions dramatiques. Une arnaque judiciaire décidée en haut lieu qui a coûté la vie à un grand militant des droits de l’homme et de la démocratie.

Cette fois-ci, réussiront-ils à détourner l’espoir ?

La douleur est intacte, égale à celle de 2001. Le sentiment d’injustice qui domine sera la raison pour poursuivre le combat jusqu’au bout de l’engagement et rétablir la vérité. Si les actes criminels demeurent impunis comme ceux de 1988 à Alger, et 1986 à Oran et à Constantine, un État de justice ne sera qu’illusoire.

Mahfoudh Messaoudene

Source Kabyle Universel

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