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jeudi 21 novembre 2024
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Des cinéastes algériens dénoncent la censure et le monopole de l’État

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Le cinéma algérien, s’il en existe encore est dans un état alarmant. En plus de la fermeture des salles obscures, de la maigre et médiocre production et l’absence du public, s’ajoutent les lois liberticides et répressives instaurées par l’ex-ministre de la Culture Khalida Toumi en 2010. Ces lois qui sont devenues l’épée de Damoclès au-dessus des têtes des cinéastes, des réalisateurs et des producteurs. La censure, les tracasseries administratives et le refus d’aides financières à ce secteur tombent toujours sur toute initiative qui sort de la voie tracée par les gardiens du temple.

Khalida Toumi, l’ex-ministre de la Culture.

Selon El Watan édition du 19 avril 2011, la nouvelle loi relative à la cinématographie qui avait été adoptée par le Parlement ne cesse de susciter la colère des cinéastes en Algérie.

L’article 6 de la nouvelle loi relative à la cinématographie, qui soumet la production de films sur la guerre d’indépendance à l’approbation des autorités politiques, est considéré par de nombreux réalisateurs algériens comme « un retour au monopole de l’État sur la production cinématographique ». À ce sujet, le producteur Bachir Derrais a fait savoir mardi dans une déclaration à l’APS qu’il est la « première victime de cet article » en évoquant son projet de long métrage sur Larbi Ben M’hidi.

Bachir Derrais estime que l’article pénalise les cinéastes, surtout, ajoute-t-il qu’il reste « vague » sur la partie apte à délivrer l’autorisation. « On est les otages de la nouvelle loi, ne sachant plus à qui s’adresser, car deux ministères, celui de la Culture et celui des Moudjahidine, réclament, chacun, un droit de regard sur les films portant sur la guerre de libération nationale », s’indigne ce producteur qui projette de tourner un film sur la vie de Ben M’hidi.

Suite au dépôt du projet de ce long métrage, une « fiction », précise-t-il, il s’est vu proposer une offre de produire la totalité du film par le ministère des Moudjahidine qu’il a déclinée, nous apprend encore à ce propos l’APS.

« Accepter de se faire produire par un organe de l’État, ouvrirait les portes de l’ingérence de ce dernier dans le contenu du film », se justifie de son côté Bachir Derrais. Ce producteur se soucie, en outre, de la « carrière » d’un film produit par un ministère quand il s’agira de son exploitation et de sa présentation dans les festivals, avant de mettre en garde contre « le risque de le mettre (le film) dans un tiroir et le condamner à l’oubli ».

De son côté, Ahmed Rachedi, réalisateur et producteur de plusieurs documentaires et de fictions sur la guerre de Libération, relève que les autorisations pour les films traitant de la guerre de libération nationale « existaient avant la nouvelle loi ». Toutefois, aujourd’hui, les nouveaux textes vont encore, précise-t-il mardi à l’APS, consacrer davantage « la censure et le monopole de l’État sur la production cinématographique ».

Selon El Watan

Un rapport remis à Macron s’inquiète de la montée de l’islamisme en France

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« Taxe halal » et arabe à l’école : l’Institut Montaigne préconise plusieurs mesures contre l’islamisme.

Une association pour financer l’islam de France, notamment par le biais d’une « taxe halal », renforcer l’apprentissage de l’arabe à l’école : l’Institut Montaigne a présenté dimanche 9 septembre des propositions pour lutter contre le fondamentalisme qui « progresse chez les musulmans de France », selon un rapport.

L’auteur du rapport, Hakim El Karoui, a présenté sur RTL sa mesure phare, déjà évoquée depuis plus de deux ans par ce groupe de réflexion libéral : la création d’une Association musulmane pour l’islam de France (Amif).

Réguler des flux financiers parfois « opaques » 

Selon le nouveau rapport de l’Institut Montaigne, qui doit être adressé au président de la République et à tous les partis politiques, « les musulmans se sont enrichis, contrairement à ce qu’on croit et ils pratiquent beaucoup », a résumé Hakim El Karoui. Il y a donc « de plus en plus d’argent lié à la consommation : le pèlerinage, le halal, le don ».

Et le consultant de développer :

« L’idée, c’est de créer une organisation neutre, indépendante des pays d’origine, indépendante de ceux qui tiennent aujourd’hui les mosquées, pour prélever une toute petite somme d’argent sur chaque acte de consommation et réinvestir cette somme d’argent dans le travail théologique, parce que c’est la mère de toutes les batailles. »

Cette structure pourrait notamment gérer une « taxe halal », idée maintes fois évoquée depuis les années 1990 pour financer l’islam de France. « Il n’y a pas de ‘taxe halal’ au sens où il y aurait un impôt prélevé par l’Etat », a expliqué l’ancien banquier. Le prélèvement serait géré par l’association et s’inspirerait de la « taxe de cacherout » de la communauté juive, gérée par les rabbinats et qui permet de certifier les produits « casher », a-t-il développé.

L’association pourrait investir « dans la formation de cadres religieux, la construction pourquoi pas de certaines mosquées », a-t-il ajouté. Et rendrait un « service utile aux fidèles » en se posant comme « régulateur » des flux financiers, parfois « opaques » dans la communauté musulmane.

Valises de billets et dons hors contrôle : la très opaque gestion de l’islam de France

Hakim El Karoui, qui a l’oreille d’Emmanuel Macron, préconise également de renforcer l’apprentissage de l’arabe à l’école publique. « Le nombre d’élèves qui apprennent l’arabe au collège et au lycée a été divisé par deux. Il a été multiplié par dix dans les mosquées, il faut savoir ce qu’on veut », a-t-il argué.

Montée inquiétante du salafisme  

Son rapport constate « la progression de l’idéologie islamiste chez les musulmans de France », a-t-il résumé. Les salafistes – branche rigoriste de l’islam – « gagnent du terrain à l’intérieur de la communauté », surtout chez « les jeunes de moins de 35 ans ».

La quasi-totalité des réponses sur internet aux questions religieuses est fournie par des prédicateurs proches des salafistes, s’inquiète Hakim El Karoui, qui pointe aussi le développement de sites communautaires, d’hébergement ou de covoiturage « halal ».

Macron tranchera bientôt  

Ce rapport est publié alors que sont organisées jusqu’à mi-septembre des « assises territoriales de l’islam de France » dans chaque département, sous l’égide des préfets, pour faire émerger des propositions inédites.

A l’issue de cette concertation, « dès l’automne », l’exécutif donnera « à l’islam un cadre et des règles garantissant qu’il s’exercera partout de manière conforme aux lois de la République », avait déclaré début juillet Emmanuel Macron devant le Congrès réuni à Versailles.

(Avec AFP)

Mouwatana : Appel à la communauté algérienne à l’étranger

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Appel à la communauté algérienne à l’étranger :
Rassemblement à Paris samedi 15 septembre pour soutenir Mouwatana 

 

Nous, organisations politiques et associatives de la communauté algérienne à l’étranger, préoccupées par les risques de délitement du pays, dénonçons ce régime et appelons à l’urgence de son départ, de manière pacifique mais résolue.

Nous appelons les citoyens algériens établis à l’étranger à venir renforcer le mouvement citoyen Mouwatana et à nous rejoindre lors du 1er rassemblement que nous organisons à Paris samedi 15 septembre à 14h30 sur la place de République (Paris 10ème, M° République) pour accompagner, soutenir et faire écho aux rencontres citoyennes de Mouwatana en Algérie.

« La Tada » chez les Aït Hkem du Maroc

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Aït Hkem est un groupe de tribus situé au pied de Moyen Atlas, à 100 kilomètres au sud-ouest de Rabat et 160 kilomètres au sud-est de Fès. Cette confédération dit  » Beni Hakem- Tedders » au temps du protectorat français, dépend de la province de Zemmour-Khémisset appartenant à la région de Rabat-Salé-Kénitra. Les tribus formant aujourd’hui le groupe d’Aït Hkem sont : Mchichita, Aït Zoulit, Aït Baboud, Aït Zaghou, Aït Bouguemal, Aït Boumeksa, Aït Bouhaki, Aït Mhammed, Aït Bouzit, Aït Alla. Elles se dispersent autour du petit village de Tiddas, localisé entre Mâaziz et Oulmès. Ce hameau a été créé par les autorités du protectorat français au début du siècle dernier.

Bien que ce groupe fasse partie du grand groupement berbère Zemmour, les Hkmaouites s’aperçoivent comme unité indépendante du voisinage. D’ailleurs, certaines sources historiques citent Zemmour et Aït Hkem séparément. Marcel Lesne, considérant les « Bni-Hakem » comme étant une partie des huit grandes tribus sous-confédération Zemmouries de l’époque, met l’accent sur la particularité de ce groupe[1] : « Sans rechercher d’hypothétiques comparaisons avec les tribus Zemmour que nous connaissons aujourd’hui, constatons simplement l’existence de deux sous-groupes distincts, et l’importance des Bni-Hakem dans cet ensemble. Et à ce propos, il est remarquable de constater que les auteurs marocains citent toujours Zemmour et Bni-Hakem, mettant ainsi en relief le caractère particulier de ce dernier groupement ».

Les Hkmaouite très attaché dans le passé à leur « orf » ont mis en place un arsenal de droit coutumier assez particulier, qui s’appliquait en toute indépendance du pouvoir makhzenien. Le contexte de siba (dissidence), connue historiquement comme étant une forme de contestation politique et sociale au pouvoir central, a exigé la création des institutions symbolique aptes à garantir l’harmonie du groupe et à assurer la paix avec le voisinage. Le siba était marquée également par les conflits inter et intra-tribaux. Des rivalités autour du pâturage et des sources d’eau provoquaient souvent des combats impitoyables, seuls les pactes de paix pouvaient y mettre fin et maintenir l’équilibre, le pacte sacré de tada en faisait partie.

Le terme berbère tada désigne étymologiquement l’allaitement collectif, il est issu du verbe itted (téter), lié pour sa part au terme assutted (allaitement). Toutes les tribus d’Aït Hkem sont jusqu’à nos jours unies à d’autres tribus du voisinage par un pacte d’allaitement collectif. Les alliés reconnaissent tous la sacralité de cette alliance, créant une fraternité éternelle et exigeant un respect mutuel, mais la plupart de la population ne connait guère le détail du rite concrétisant cette alliance. Les textes produits lors de l’époque coloniale, ainsi que l’ouvrage de l’anthropologue Hammou Belghazi, sur la tada demeurent les principales sources en la matière.

Chehba Ghait, une native de la tribu Aït Elânzi âgée de 82 ans, a confirmé qu’elle ne sait rien ni sur le rite ni sur l’objectif de cette pratique sociale, mais la sacralité du lien fraternel entre les outada semble évidente pour elle :  » Je ne sais pas comment les liens de tada ont eu lieu entre les tribus, tout ce que je sais c’est que nous et Aït Zoulit sommes des outada, nous nous aimons, nous nous respectons comme frères et sœurs. Le mariage entre les femmes et les hommes des deux tribus est interdit. L’hostilité et la perfidie ne devront pas avoir lieu entre nous. Personne ne peut trahir l’autre, sinon il sera exposé à la vengeance divine. Tada twâr (dangereuse). Les liens de fraternité de tada que je connais sont : Aït Elânzi avec les Aït Zoulit, les Aït Mahfoud avec Aït Mchichita, Aït Boubker avec Aït Bouchlefen, Aït Atta avec Aït Bouhaki et les Aït Zaghou avec les Aït Baboud et en fin Aït Bouguemal avec Aït Ikkou. »

Le rapport de la Mission scientifique française sur les villes et les tribus du Maroc note que tada « aurait été initiée par un certain Cherif Bou Ishak ayant écrit sur une tablette une liste des outada (frères de lait) Aït Ikkou et Aït Bouguemal. Ladite tablette a disparu et aucune trace écrite n’a été gardée.

La tada représente un acte permettant le passage d’un état de guerre à un état de paix, d’une relation conflictuelle à une relation pacifique. C’est une alliance à caractère sacrée entre deux lignages ou deux tribus qui exige le devoir de protéger l’un l’autre contre toute attaque extérieure. Lorsque l’un des lignages ou tribus alliés vient solliciter le soutien de son outada, ce dernier doit spontanément répondre à la demande. Il s’agit d’un pacte solennel d’où résultent des engagements que l’on ne doit pas trahir, sous peine d’être puni par la volonté divine, ou encore devenir objet de mépris de la part des membres des parties contractantes.

L’anthropologue Hammou Belghazi souligne que trois démarches étaient primordiales pour la concrétisation de tada. D’abord le repas rituel, le tirage au sort des chaussures et la présence d’un amas de pierres ou d’un bordé à ciel ouvert de caractère sacré. Jusqu’au début du XXe siècle, la concrétisation du pacte de tada se faisait autour ou près d’un monument sacré : agrur (ensemble de pierres déposées les unes sur les autres et formant une pyramide), hawch (demeure à ciel ouvert) ou sanctuaire d’un saint (seyyed). Ce rite, se déroulant en deux temps qui correspondaient chacun à la réalisation d’une pratique particulière, était célébré par un spectacle de fantasia et de danse populaire Ahidous. Les tribus contractantes devaient, en premier lieu, consommer un repas spécifique à cet évènement, ensuite elles procédaient à un tirage au sort des chaussures des chefs de familles issus des groupes concernés.

Le repas rituel était la première étape du processus de la concrétisation de l’alliance. Il constituait la pièce angulaire de tada et consistait en le partage de la nourriture (uchchour n t’am) inaugurant le rite. Belghazi cite les témoignages de certaines personnes parlant d’un repas composé d’un couscous arrosé de lait de femmes, alors que d’autres ont soutenu l’idée que ce plat était arrosé de miel, sinon il était limité à des dattes partagées.

Le couscous arrosé de lait de femmes, bien qu’aucune source historique ne le confirme, semble être une pratique très ancienne. Le mot tada désignant l’alitement collectif peut fortement trouver son origine dans le lait des femmes, qui aurait été utilisé pour arroser le couscous. Un native d’Aït Hkem avait affirmé à Belghazi cette hypothèse [2] : « Nos parents nous ont raconté que lorsque les gens veulent conclure un accord pour qu’il n’y ait plus d’hostilité, ils scellent la fraternité absolue, la tada. Ils se réunissent, préparent un couscous et l’arrosent de lait de femmes appartenant à ces tribus. Ils mangeaient ce couscous et deviennent utada-s, frères […], comme des frères allaités du même sein. C’est comme ça que s’établissait la tada ».

La présence du lait comme substance sacralisant le lien de tada, évoque l’importance de la femme dans la société hkmaouite dans un passé lointain. L’hypothèse impliquant le lait paraît plus logique et explique le choix du terme tada (allaitement collectif), d’autant plus que l’allaitement produisant des liens de parenté classificatoires était très répandu en Afrique du Nord. L’arrosement du couscous avec le lait de femmes a fort possiblement disparu avec la parution de la société patriarcale.

La deuxième étape du rite de tada comprenait le tirage au sort de chaussures, qui se faisait ainsi : les membres mâles de familles des deux groupes célébrant l’événement se déchaussaient et donnaient l’une ou l’autre chaussure, dite afrghous, pour en former un amas : chaussures droites du premier groupe et chaussures gauches du deuxième, ou inversement. Dès que les chaussures (ifrghoussen. sing. afrghous) sont rassemblées, la personne la plus âgée ou deux notables des deux groupes veillaient sur le tirage au sort. Ils prenaient, une paire après l’autre, les fausses paires de chaussures et les donnaient à l’assistant. Une fois le tirage terminé, les contractants se rechaussaient. « il s’agit d’un appariement de chaussures différentes pour en faire des paires et, par symbole, « appareiller » les hommes deux à deux comme des frères[3]« .

Certaines notes de la Missions scientifique rapportent d’autres éléments concernant ce rite. Quelques tribus auraient conclu ce pacte de manière légèrement différente. Par exemple, un homme des parties souhaitant sceller la tada, rassemblait les ifrghoussen des hommes présents et les cachait dans son burnous. Ensuite, un autre prenait successivement les babouches, les levait en l’air par paires. Les contractants prenaient, chacun une fausse paire, et les possesseurs de chaque paire différente sortaient de la foule, se promettaient en amitié devant tous et s’en allaient ensemble. Il existait également une autre pratique similaire consistait en l’échange de burnous[4].

La concrétisation de tada se faisait auprès d’un lieu sacré : hawch ou seyyed d’un saint à ciel ouvert. Ce lieu sacré constituait un élément primordial dans le processus de ce rite ce qui invoque l’importance du culte des saints dans la région. Le pays de Zemmour et Aït Hkem était peuplé par un grand nombre de sanctuaires occupant souvent un lieu précis dans un cimetière.

La présence du sacré dans ce rite a fait que plusieurs mythes ont été tissés autour, au point de lui attribuer une puissance divine. A titre d’exemple, les Aït Bouguemal transmettent de père en fils l’histoire du sabre et du serpent. La légende raconte qu’un jour, des gens d’Aït Ikkou qui étaient de passage sur un lieu où demeuraient des Aït Bouguemal, ont aperçu un sabre. Quand ils ont tenté de l’emporter, ce dernier est tout à coup devenu un serpent. Ils se sont éloignés et le sabre a réapparu. Ils ont compris qu’il s’agissait d’un avertissement de tada, et ont juré que ladite arme devait être rendue à son possesseur. Ainsi, l’arme a gardé sa forme et ils ont pu la prendre et la rendre à leur outada.

Une autre histoire liée toujours au « miracle » de tada raconte qu’un notable des Aït Ikkou aurait rencontré sur son chemin une femme portant un nourrisson sur le dos. L’homme s’est senti attiré par cette femme et a voulu l’aborder, mais une fois qu’il s’est rapproché d’elle, elle a disparu. L’homme continuait à entendre les cris de l’enfant sans voir la femme. Il s’est éloigné et la femme a apparu. Il a tenté encore une fois de se rapprocher et elle a disparu à nouveau, jusqu’au moment où il a compris que cette femme, issue d’Aït Bouguemal, était une sœur du lait collectif (oultada). Soudain, son désir le quitta et la femme reparut.

Aussi, le récit d’un combat cruel ayant lieu entre un natif des Aït Bouguemal et un de ses frères de tada d’Aït Ikkou, marque toujours l’imaginaire de certaines personnes âgées. Les gens racontent que les deux hommes ont passé toute la journée à se battre sans pour autant se blesser. Quand le Bouguemali est rentré chez lui, il a trouvé plus de quarante balles dans son harnachement et ses vêtements. Il a vérifié son corps pour s’assurer qu’il n’a pas été vraiment touché et constata qu’il a été bien sain et sauf. Cette histoire illustre l’importance qu’accordaient les Hkmaouites à cette alliance très vénérée.

Le rite de tada créait donc un lien de parenté non biologique ayant pour but d’assurer la paix, la stabilité et la cohésion des groupes concernés. L’allaitement collectif était une forme de manipulation de substance humaine, ce afin de concrétiser un lien de parenté sacré dépassant la parenté biologique. De cette parenté symbolique, associée au monde féminin, résultait un certain nombre d’interdits. Marie-Luce Gélard souligne à ce propos que lorsque deux fractions ont échangé le lait, cela suppose désormais une homologie non seulement durable, mais permanente de la substance lactée entre l’ensemble des descendants des deux groupes, instituant une stricte prohibition matrimoniale.

En somme, la tada s’inscrivait dans un rite religieux qui témoignait le passage de la guerre à la paix. Elle était l’une des caractéristiques coutumières les plus marquantes du Maroc précolonial, où les Berbères de Moyen Atlas et Haut Atlas en particulier, avaient souvent recours à des coutumes aptes à assurer l’équilibre des groupes en l’absence d’une organisation centralisatrice. C’est un adage de sagesse populaire ayant pour but la cohésion sociale, à travers la création de liens de parenté artificielle. Les zones insoumises, dont les Aït Hkem faisaient partie, trouvaient dans la tada une issue permettant de mettre fin aux relations conflictuelles perturbant les rapports inter et intra-tribaux.

Les mutations socio-économiques et politico-judiciaires ont fait que ce rite a perdu son rôle sociopolitique et est devenu un symbole culturel sans importance réelle. Toutefois, les individus des tribus liées par la tada continuent toujours à sacraliser cette alliance et à reconnaître sa puissance. La nouvelle génération, en tentant de garder le patrimoine culturel de la région, s’intéresse de plus en plus aux anciennes pratiques et les fait revivre. Les natifs de la tribu d’Aït Ikkou à Khémisset célèbrent toujours la tada lors du moussem d’Aït Hammou Boulmane. La cérémonie a lieu en mois d’août de chaque année et est accompagnée de ce rituel comme il était pratiqué par les ancêtres.

Fatiha Aarour

 

Notes: 

[1] Lesne Marcel. Les Zemmour. Essai d’histoire tribale (à suivre). In : Revue de l’Occident musulman et de la Méditerranée, n°2, 1966. pp. 111-154 ; doi : https://doi.org/10.3406/remmm.1966.932 https://www.persee.fr/doc/remmm_0035-1474_1966_num_2_1_932

[2] Ce témoignage est rapporté par H. Belghazi lors de son travail de terrain sur le pacte de tada effectué entre 1986 et 1991.

[3] Hammou Belghazi, Tada chez les Zemmour : Instances, puissance, évidence, Institut Royale de la Culture Amazighe, Rabat 2008, pp.44-63

[4] Cf. Mission scientifique du Maroc, pp. 54-240

Ben Mohamed, le père de « Vava inouva »

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Portrait

Ben n’a pas fait la guerre, mais la guerre l’a fait ! Elle l’a construit comme un gîte incertain dans la peur et l’espoir d’une quiétude future, une construction artistique d’apparence précaire, une muraille de pierre sèche avec un solide liant invisible édifiée par le hasard dans le tumulte de la guerre autour d’une femme chanteuse providentielle, un vieux disquaire cultivé, un père ouvert, mais protecteur, un bouquiniste  ancien professeur de littérature en retraite et une mère poétesse qui remontait du fond des âges les chants de la meule et du berceau .

Un enfant sans enfance

Entre la mouvance et les pauses du temps insaisissable de la guerre, le jeune Mohamed grandira dans les béances des soucis adultes ! Comme toute sa génération, il connaîtra une enfance fugace, amputée de son innocence, de tous les rêves printaniers, vadrouillant entre la ville et le village de montagne, déchiré entre deux univers antagoniques qu’il finira, grâce à la poésie, par harmoniser comme une partition magique. De cette enfance guerrière, il gardera l’image de son école incendiée, de son départ pour Alger en 1956,  où tout petit, il aidait son père Mohamed Saïd dans sa boutique de bonneterie dans la basse casbah. L’arrachement à son village natal et l’impossible enracinement citadin créeront en lui une ambivalence que la poésie colmatera comme un baume magique sur une blessure incurable et ce n’était pas son inscription à « l’école du Divan », qui pour la circonstance portait mal son nom, qui allait le guérir de la dépossession de son univers natal. Il retournera sur sa colline d’At Wacif, alors zone interdite, pour être cloîtré à la maison, avant de revenir définitivement en ville en 1958. De sa Kabylie natale il gardera le portrait fugace d’un instituteur communiste, du nom d’Albertini, de monsieur Ainouz, le directeur d’école  et d’une société,  où « l’awal », la parole donnée, l’art du discours réparateur animaient les réseaux de la vie simple que la guerre vint dérégler et entremêler comme les ressorts d’une vieille horloge, dont le tic tac, se taira sous la furie des bombes, des meurtres et des viols.

Des rencontres fondatrices

Né le 10 mars 1944 à Ath Ouacif, dans la wilaya de Tizi Ouzou, Benhamadouche Mohamed eut un parcours d’enfant que la guerre a chargé de poésie douloureuse d’une sensibilité désarmante. Il se construira tout seul, se créant ses univers au gré des rencontres et des circonstances d’où il tirait le maximum d’enseignements et d’outillages formateurs. Dés huit ans, il croisera par bonheur Slimane Azem, le fabuliste légendaire, dans un café d’At Wacif où son père l’avait emmené. Il sortira du café avec un avenir de poète tout tracé, les oreilles bourdonnantes de mots et de notes magiques et un fascicule portant des chansons de Slimane Azem écrites en caractères latins qu’il apprendra par cœur. En partance vers Alger, il cacha sous terre son fameux carnet, mais à son retour il ne l’y retrouva pas. Ce fut un terrible choc, une blessure insurmontable qui forgera en son âme d’adolescent un défi majeur : écrire des poèmes si beaux que le maître Slimane Azem en serait content ! Il trouvera consolation dans les jupons d’une femme réfugiée dans son village, un être blessé dans sa dignité qui chantait sans arrêt pour se guérir des brutalités de la guerre. Elle prolongeait les mélodies de sa mère qui avaient rythmé sa prime enfance et forgé en lui le goût du chant, de la berceuse, de la plainte lyrique, de l’appel sourd et incompréhensible des entrailles.

Avoir 20 ans à l’indépendance

Le jeune Ben fredonnait ses poèmes sur des réminiscences mélodieuses de sa maman et de toutes les femmes que la guerre lui fit croiser. En 1961, Ben Mohamed rencontra Cheikh Noureddine qui lui proposa de se faire enregistrer à la radio, mais il ne se présenta pas aux studios de peur de fâcher ses parents qui voyaient encore la chanson avec les yeux pudibonds des hautes collines.

A l’indépendance, Ben est recruté comme agent de bureau par la préfecture d’Alger. Il savait que sans une formation plus conséquente il serait enterré dans ce bureau d’assistance. Il s’inscrivit aux cours du soir au Télemly. C’est dans cette école qu’il effectua ses cycles moyen et secondaire de 1963 à 1969, sous la direction de Tahar Oussedik, avant de suivre une rigoureuse formation administrative en comptabilité publique qui mettra quelques remparts à son évasion poétique permanente. Chez Hamma son voisin disquaire, il croisera des artistes, des hommes de lettres avec qui il se liait d’amitié. Il écoutait surtout beaucoup de musiques envoûtantes sans comprendre les paroles, il se forçait à écrire des poèmes brûlants pour ces airs venus d’ailleurs tout en s’initiant à l’écriture grâce à un ami libraire qui lui prêtait des livres. Ce bouquiniste, un ancien professeur de lettres en retraite, était à lui seul un cercle culturel, il connaissait tellement de monde que Ben s’y forgea une culture conséquente et un esprit critique aiguisé. Il se soustraya progressivement à la boutique de son père pour se fondre dans l’atmosphère révolutionnaire avec des amis qui l’initiaient à la politique, à la délivrance de l’aliénation coloniale. Il se mit à écrire de textes portant la terre et le sang de sa montagne.

La mère, la terre et la langue

C’est en 1966 qu’il s’entendit chanter à l’antenne à l’émission « Les chanteurs de demain » de Cherif Kheddam. Il comprit qu’il n’avait rien à voir avec ce métier. Il connaîtra néanmoins le milieu artistique de la radio et sympathisera avec Saïd Hilmi qui animait « Plumes à l’épreuve » une émission pour jeunes poètes. Ses textes plurent à l’animateur qui lui proposa de prendre une émission. Ce fut « Heureux Matin » sa première sortie radiophonique. Armé du seul souci de parler en kabyle intégralement, il fit appel à la mémoire maternelle, sa maman demeurant sa première école et son guide. Il lui consacrera d’ailleurs un poème intense en 1973, où à travers elle, c’est la femme révolutionnaire, la femme résiliente, la femme de la montagne solide comme un roc qui est décrite et mise en valeur. « Yemma », ce poème chanté par de nombreux interprètes met en situation la langue natale, la mère résiliente et la terre protectrice. Ben écrira sans arrêt des centaines de textes faits pour être chantés.

Il mènera sa vie artistique entre la radio et les récitals poétiques de la veine contestataire portant le combat identitaire avec finesse et intelligence. Un véritable combat intellectuel qui suscita maintes vocations comme feu Rachid Aliche et autre Lounis Aït Menguellet. Les cours de berbère qu’il suivit à l’université chez Mouloud Mammeri avaient déclenché en lui un nouveau langage combattant tout en symboles et en messages contestataires de restitution de la culture des ancêtres. Ben s’impliqua à différents moments dans le débat et l’engagement militant. Il fut dans le premier groupe étudiant qui demanda en 1976 dans « une contre charte » par écrit, la reconnaissance de la langue berbère. Il aura produit six pièces radiophoniques pour la chaîne 2, et traduit vers le kabyle des dramaturgies ouvrières de Kateb Yacine. À la fin de l’année 1990, Ben Mohamed ne pouvant plus exercer son métier de comptable au ministère de l’Éducation nationale avec l’arabisation de la comptabilité publique s’exila en France où l’environnement culturel favorable lui permit de réaliser de nombreux montages poétiques, des récitals et des documentaires liés à la thématique identitaire.

Vava inouva : l’universalité amazighe

« C’est en vain que dehors la neige habite la nuit » écrira Mouloud Mammeri à propos de ce sublime poème de Ben Mohamed chanté par Idir. Cette chanson au retentissement mondial a constitué, au moment opportun, un vecteur de la sauvegarde de notre âme, un pont vers le monde, un gué pour lier les deux rives de Tamazight, l’authenticité et l’universalité.

« Txilek ldi yin tabburt a Vava inuva

Cenčen Tizevgatin im a yelli Ɣṛiva

Ugadaɣ lwaḥc lɣava a vava inu va

Ugadaɣ ula d nekini a yeli ɣṛiva »

« Ouvre-moi la porte, Vava Inouva

fais tinter tes bracelets ma fille Ghriba

J’ai peur du monstre de la forêt, Vava Inouva

Je le crains moi aussi ma fille Ghriba »

Le refrain qui remonte notre éternelle quête de paix et de tranquillité résume notre précarité perpétuelle. Nous y sommes encore aujourd’hui, menacés d’extinction culturelle, guettés par la rupture identitaire, à demander le secours des ancêtres.

Comme la jeune Ghriva qui revient de loin à travers la forêt inhospitalière, nous en appelons encore à Vava inouva pour qu’il nous tende la main, qu’il nous ouvre la porte du monde que nous portons dans nos rêves, qu’il couvre notre avancée risquée vers l’avenir avec le viatique du passé !

Chacun de nous est Yeli Ghriva, fille perdue revenue de loin qui tente d’échapper aux griffes et aux crocs du monstre qui la poursuit et qui aujourd’hui encore est sur ses talons.

Le conte Vava inouva, replacé par le poème de Ben Mohamed et la belle mélodie d’Idir dans des dimensions universelles relate notre détresse, notre perte de repères, et nous propose comme issue la solidarité entre générations, la transmission du legs des anciens, la continuité des valeurs et l’inamovibilité des repères.

En 1973, cette chanson inattendue, remontée du fond de notre matrice identitaire, nous a réconciliés avec nous-mêmes, nous a redonné du ressort, alimenté notre fierté, raffermi le sentiment d’appartenance à une communauté en besoin de renaissance ! Ce merveilleux texte nous a de nouveau amarrés à un destin universel partagé avec le reste de l’humanité. Vava inouva a ressuscité en nous l’envie de nous battre, exacerbé le besoin d’être nous-mêmes, avec nos différences, nos singularités, mais semblables pour l’essentiel aux autres dans ce qu’ils ont de meilleur. La guerre de libération a forgé en nous une âme collective verruqueuse, un gros cœur douloureux chargé de furoncles enkystés dans l’âme, l’indépendance de l’Algérie a été incomplète pour nous autres, qui avons ravalé notre quête identitaire le temps de chasser les colonisateurs, mais hélas l’indépendance nous a dessaisis de l’initiative historique et culturelle, nous a relégué dans le monde de l’interdit, le royaume du silence et de la peur.

Vava inouva : la délivrance inattendue 

Vava inouva fut le chant de notre indépendance retrouvée, notre hymne à la liberté, à l’ouverture, à la modernité. J’ai vécu la naissance de cette œuvre magistrale avec une certaine proximité comme un adolescent qui attend fébrilement que sa maman se libère et lui donne la sœur qui lui manquait tant ! J’habitais El Mouradia, Idir habitait la tour de Diar Saada, mon cousin Hassan qui était un peu mon tuteur était l’un de ses amis intimes, ils ne se quittaient jamais ! Nous étions un groupe d’étudiants que Hassan tenait en haleine, il allumait notre curiosité et entretenait notre attente à doses homéopathiques : – « Idir a fini par apprendre le poème de Ben Mohamed, Idir a fini la musique, Idir a vu Nouara, Idir a fait ceci, Idir a fait cela. C’est Idir qui va la chanter, ce n’est pas Nouara, ce n’est pas Aït Meslayene, ce n’est pas Samy Ldjazayri, ce n’est pas X, ce n’est pas Y… ».

Hassan nous tenait otages de ses informations jusqu’au jour il nous révéla qu’Idir était en studio chez Oasis … L’attente devint insupportable ! La libération survint inattendue, la petite sœur souhaitée fut une princesse, une fée, un être magique qui dés les premières notes conquiert amis et adversaires ! Ce fut le bonheur ! Comme pour toutes les naissances heureuses, nous avions adopté le bébé et nous l’avons porté à bout de bras, à bout de cœur à travers les méandres de nos espérances ! Nous achetions des dizaines de disques et nous les distribuons aux amis coopérants étrangers, nous voulions qu’ils sachent que nous étions capables du bon, du très bon !

Dans notre imaginaire ancien, Anza est l’appel des héros assassinés par traîtrise par de faux frères. Anza est ce murmure venu du fond des tombes ! Seuls les artistes à l’ouïe fine peuvent l’entendre à leur passage devant le cimetière, le panthéon des aïeux ! Idir est de ceux-là ! Il a entendu anza n’ Taqvaylit lancé douloureusement par le poète Ben Mohamed au moment où la course à la fortune obturait les oreilles de nombreux artistes anesthésiés par les mélodies langoureuses de l’Orient ou embrigadés par les sonorités métalliques de l’Occident ! Quand on entend Anza, on organise Asfel, le rite propitiatoire et sacrificiel, on fait alors offrande de ce que nous avons de meilleur. Pour ce poème, perle brillante sur la neige brûlante qui habite la nuit kabyle, Idir a donné le meilleur de lui-même, son engagement, sa voix, sa musique, à un moment où personne ne croyait à la greffe de l’écusson kabyle sur le blason de la culture universelle ! Grâce à cette chanson, la vie a pris le dessus sur la mort !

Vava inouva nous a tendu la main pour nous faire traverser Assaka, le gué salvateur. Le monstre de la forêt est toujours là, nous lui avons porté des coups, nous l’avons fait douter de sa force ! Le monstre a peur ! La peur a changé de camp ! Ben Mohamed ou Vava inouva peut désormais ouvrir la porte de notre univers tel que les ancêtres l’ont gravé dans l’imaginaire collectif. La culture kabyle, ou la jeune Ghriva, n’a plus besoin de faire tinter ses bracelets pour retrouver la chaleur de son foyer

Rachid Oulebsir

 

 

Caricature AÏNOUCHE

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Les hommes libres sont nés libre

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L’Histoire reste constamment en éveil tant que toutes les vérités n’ont pas été, l’une après l’autre, mises à la lumière. Il est ainsi d’une réalité que notre histoire dissimule et dont les racines remontent au mouvement national libérateur, la question berbère.

Cette question identitaire des Algériennes et des Algériens a été étouffée, dévoyée et souvent diabolisée par les différents acteurs de la vie politique algérienne que ce soit dans les années 40 ou post-indépendances. Les amalgames et les raccourcis sont toujours empruntés par les détenteurs d’un pouvoir aussi petit, soit-il, pour noyer comme à l’accoutumée, cette revendication légitime, pacifique, qui à terme, sera le catalyseur d’une démocratisation de l’Algérie et partant, de tout le Maghreb des peuples.

Déjà, à l’indépendance, le spectre du « berbérisme » et du «séparatisme » a été nourri par les « nouveaux révolutionnaires » gardiens du temple vide des « Thawabits ». La dimension amazigh est bannie. Dans les manuels scolaires, aucune référence n’est faite aux ancêtres Massinissa, Jugurtha, Juba, La Kahina….

Mouloud Maameri, l’anthropologue et écrivain, tente de percer le silence et la rétention du pouvoir de l’époque sur la question culturelle. Mais, dans sa logique stalinienne, le pouvoir pousse une jeunesse avide d’identité et de vérité à l’exacerbation.

Ainsi, en avril 1980, sur un acte d’autorité, une simple conférence de Mouloud Maameri est annulée à Tizi Ouzou. Les étudiants protestent. Le régime réprime la contestation avec une violence inouïe. Le Mouvement Culturel Berbère (MCB) est né ! Il prendra en charge la revendication identitaire qui est d’essence pacifique et démocratique. Cet acte constituera l’un des événements politiques majeurs de l’Algérie indépendante, surtout que c’est une génération formée à l’école algérienne et qui n’a pas connu la colonisation française qui a pris ses responsabilités devant l’histoire. Bien que moulée dans le système éducatif du régime éloigné de la réalité socioculturelle, cette jeunesse a remis brutalement la question Amazigh sur la scène de l’actualité en ces temps de glaciation et du Parti unique !

Des années durant, et après ces événements, les animateurs du MCB ont toujours porté« à bras-le-corps » la revendication identitaire, en faisant face à différentes étapes de leurs parcours, à toutes sortes de manipulations, défis et coups de boutoir du pouvoir en place : accusations de « complot colonialiste », divisions….

Plus près encore, sous l’ère de Bouteflika, issu de « la dernière fraude du siècle » à Tizi Ouzou, et en présence de personnalités nationales et régionales, la question Amazigh est de nouveau piétinée. À une question de constitutionnalité de Tamazight, Bouteflika répondra par le tristement célèbre « JAMAIS ».
Les Algériens lui répondront par le même mot « JAMAIS », on n’arrêtera la marche d’un peuple pour renouer avec son identité et retrouver enfin la paix quel que soit les manœuvres grossières des apprentis sorciers qui déterrent la hache de guerre pour diviser ce qui reste des vrais défenseurs de Tamazight.

Depuis toujours, des hommes libres se sont battus pour avoir un rayon de soleil dans leur printemps, jusque-là, teint aux couleurs de l’automne qui ne veut pas disparaître. Leur rendre hommage, aujourd’hui, n’est que justice et reconnaissance, car ils étaient des Hommes justes et obstinés à faire aboutir leur noble cause, qui ne se limitait pas au vouloir parler la langue de leurs ancêtres librement, mais aussi pour rendre universelle dans l’esprit de l’intelligence des Algériens, qui se reconnaissent légitimement à travers elle, sans attendre une reconnaissance de la part des pouvoirs publics, qui ont lâché du lest en reconnaissant, au forceps; il est vrai, le caractère national de la langue amazigh dans la constitution « remaniée ».

  • Aujourd’hui, les Algériennes et les Algériens doivent faire une halte salutaire et se poser les questions pertinentes :
  • Peut-on toujours faire semblant de ne pas voir ce qui est évident ?
    Peut-on continuer à nier l’essence même de la nation algérienne sous des faux-fuyants et de faux prétextes ?
  • Peut-on continuer la « théâtralisation du leurre » en faisant semblant d’introduire quelques réformettes à l’école en guise de semblant de reconnaissance ?
  • Peut-on, enfin évoquer une Nation sans l’identifier, sans être fiers du creuset civilisationnel qui la berce ?
  • À quand les véritables débats pour les bonnes solutions ?

La réalité Amazigh de l’Algérie est là. Elle nous interpelle depuis la nuit des temps. Elle est là à travers les écrits et les ouvrages d’éminents écrivains (Iben Kheldoun dans l’histoire des Berbères, Mouloud Maameri…).
Elle est là à travers les noms des villes et villages (Tablat, Rélizane, Tlemcen, Tamezguida…).
Elle est là à travers les noms des montagnes (Adrar, Idjabren…). Elle est là à travers les vestiges archéologiques…
Elle est là à travers le parler algérien, les mœurs et coutumes de chaque famille, de chaque village avec un système de gouvernance harmonieux, juste et équilibré.
Elle est là à travers le caractère frondeur de chacun d’entre nous. Elle est là à travers le sens de la rhétorique (fierté et nif…).
Elle est là à travers le respect du droit de la personne humaine et la promotion de la femme qui a sa place dans la société (Antinea ou Tinhinane ou celle qui a dit ; Kahina ; Fadhma N’soumer …). Elle est là à travers l’esprit de solidarité et le sens de l’hospitalité. Elle est là à travers la grandeur d’âme et la simplicité de l’Algérien…enfin, elle est là avec tout ce qui est nécessaire pour justifier l’existence d’une Nation qui l’identifie des autres Nations.

La culture Amazigh est le référentiel même qui rassemble et unit les peuples du Maghreb et « la culture, c’est ce qui reste quand on a tout oublié ».

L’Amazighité est un facteur d’union de la Nation algérienne. Elle constitue le socle de l’Algérie, le noyau dur, le prolongement identitaire de nous-mêmes aux côtés de l’islamité et de l’arabité, autres facteurs d’union. Sa négation serait la négation de nous-mêmes, de la Nation algérienne.

Aujourd’hui plus qu’hier, il est important de réaffirmer que la reconnaissance constitutionnelle de Tamazight en tant que langue nationale et officielle ne peut et ne doit faire oublier aux militants que son émancipation est indissociable de la lutte pour la démocratie et le respect des droits de l’homme.

Dr Amokrane Lakhdar

 

Les femmes noires tunisiennes : La couleur de notre colère

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Tout est significatif. L’engagement dans une lutte sociale est loin d’être un signe d’intelligence, mais selon ma modeste lecture et expérience, l’engagement est une décision purement politique.

Nous, les femmes noires, notre engagement dans la lutte contre le racisme en Tunisie, cette entité géopolitique méditerranée arabo-musulmane, est plus que difficile, voire douloureux. Engagement dans un contexte sociopolitique où une grande variété de pouvoirs (les institutions politiques, la société civile, les médias, des universitaires, des acteurs noirs eux-mêmes…) s’allient afin de minorer cette question.

Le racisme pervers dans notre pays, je le compare avec le mercure. Nous le voyons clairement, il brille et, pourtant nous sommes incapables de le tenir entre les mains. Une grande frustration qui laisse un arrière-goût amer. Mais nous essayons encore et encore de faire en sorte que cette question soit abordée de manière concrète et qu’on en débatte profondément.

Quand tu comprends, tôt ou tard, que tout est politique : ta classe, ta catégorie, ta situation économique, ton image, ta représentation dans ta société… Tout est défini et encadré directement ou indirectement par le politique… Tu commences peu à peu à examiner des données sur le racisme, qui pendant très longtemps ont été considérées comme non politiques. Tu te saisis de ces données, d’ailleurs lacunaires (des mailles de la chaîne de l’histoire ont été totalement perdues, y compris l’esclavage et sa représentation), tu les décortiques et tu les déconstruis pour finalement comprendre que ces données historico socio-économiques ont été constituées sous l’égide du politique.

Quand tu es noir dans un monde majoritairement « blanc » ou qui se voit comme blanc, tu te retrouves malgré toi dans ce cercle de représentation, fruit du passé. Là, tu as deux choix. Résister ou résister.

De toute façon tu es obligé de résister, mais c’est à toi de choisir ta façon de le faire. La majorité des noirs tunisiens ont choisi la résistante silencieuse. Lutter quotidiennement pour une vie meilleure, aux côtés du peuple dans son ensemble, sans faire de leur lutte une lutte spécifique. Une résistance qui se dilue dans la résistance du peuple en général, sans que le fait que leur couleur noire soit à l’origine d’un effort double soit seulement reconnu, dans une société où la lutte des classes a écrasé la lutte contre le racisme de couleur : l’occultation de la cause de Slim Marzoug dans les années 1960, l’injustice contre le poète Belgacem Yaagoubi, le racisme contre Najiba Hamrouni, etc.

Comme toutes les femmes noires en Tunisie, j’ai porté dans mon ADN le traumatisme de l’agression, de la discrimination et des stigmatisations, mais, comme beaucoup d’autres femmes noires aujourd’hui, j’ai décidé de changer cette réalité alarmante de notre vécu. Ces femmes et moi voulons une nouvelle image et cherchons une nouvelle place dans notre société. Nous sommes en train de nous battre pour légitimer notre existence dans ce pays, notre appartenance à ce pays. Un combat dur, mais possible.

Notre lutte est purement politique et elle ne peut pas être analysée autrement. La grande marche-caravane qui a été organisée par des activistes noirs en mars 2014 et qui a démarré de Djerba en passant par Gabès et Sfax pour arriver à Tunis un 21 mars[1] 2014, était l’initiative d’un groupe des femmes lors d’une discussion sur Facebook. Cet engagement féminin contre le racisme dit long.

Photo 1 : Amyna Soudani membre fondateur de l’association ADAM première Association en Tunisie pour la lutte contre le Racisme et membre organisateur de la marche de 2014 (Tunis Mars 2014

 

 

 

Photo n°2 : Imen Ben Ismail et Maha Abdelhamid membres organisateurs de la marche de 2014 (Sfax, mars 2014).

Dans mon cas, le choix de la recherche en sciences sociales était un moyen de comprendre, de décortiquer, et par conséquent de déconstruire mon histoire et mon vécu.

Issue d’une classe populaire modeste, j’ai vécu les frustrations d’une femme noire marginalisée dans sa société et sur laquelle on projette tous les clichés du monde. La majorité des femmes noires dans ma ville et mon entourage étaient des femmes de ménage, des nourrices chez les grandes familles ou des ouvrières…les quelques femmes noires aides-soignantes, institutrices, fonctionnaires ou même professeures de lycée constituaient l’exception et elles n’ont pas pu changer cette stigmatisation qui touche largement les femmes de ma catégorie. J’étais surtout encouragée par ma mère (aide-soignante) et ma grand-mère (femme de ménage) à continuer mes études supérieures. Elles m’avaient appris que les études étaient le seul chemin d’émancipation et le seul moyen de rompre avec la stigmatisation qu’on a toujours subie. Cette stratégie est en soi une stratégie de résistance politique par des femmes noires en Tunisie qui ont bien compris que seul le parcours supérieur de leurs filles ainsi que l’engagement concret dans les mouvements de militantisme peuvent faire rempart à cette stigmatisation. Selon Bahri dans sa thèse « Les Noirs n’ont jamais pu dépasser un taux d’entrée dans le secondaire de 25 %. […] Les Noirs souffrent de la faiblesse de leurs capitaux économiques » (BAHRI, 1992, p.276). » Ces mêmes femmes luttent pour rompre avec les séries d’anecdotes qui victimisent les noirs[1] et qui sont répétées dans les médias depuis 2011 à chaque fois qu’on parle du racisme. Elles ont décidé de mettre fin à la « ridiculisation » d’une vraie bataille de fond contre le racisme politique, contre une histoire d’oppression, contre une histoire de silence. J’exprime mon respect et je manifeste ma sincère fierté à toutes ces femmes citées en note de bas de page qui ont choisi une lutte acharnée, brisant ainsi le silence, en imposant une nouvelle image des femmes noires qui disent STOP à la stigmatisation et qui visent à agir collectivement afin de donner une nouvelle couleur de la sphère féministe en Tunisie qui reflète la vraie couleur de la population et de la société Tunisienne.

Maha Abdelhamid

Chercheur et militante tunisienne

 

[1] Journée internationale de la lutte contre le racisme.

[2] Je pense également à toutes ces femmes comme Amina Soudani, Ghalia Soudani Imen Ben Ismail, huda Mzioudet  Saadia Mosbah, Samira Trabelsi, Afifa Letifi, Houda Derbal, Jamila Camara, Baya Mrabet Ghrissi et ses filles, Jamila Debech Kssikssi, Amal Belkhir, Sabrine Jertila Sana Krir, Fatma Ben Barka, Imen Sayeh, Imen Akacha, Latifa Letifi, Fatima Jaidi, Iman Marouani, et bien d’autres qui ont choisi une lutte acharnée, brisant ainsi le silence , en imposant une nouvelle image des femmes noires qui disent STOP à la stigmatisation.

Nadia Matoub défend la mémoire du rebelle

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C’est sur sa page Facebook que Nadia Matoub, la veuve du rebelle a publié une déclaration par laquelle, elle accuse le pouvoir algérien de vouloir récupérer la mémoire du chanteur le plus aimé de tous les temps et de vouloir s’accaparer de sa demeure qui porte dans chacun de ses coins l’âme de celui qui a tout le temps combattu ce pouvoir qui reste toujours le même.

Nadia s’oppose catégoriquement au musée qui viendra de ceux qui refusent encore d’élucider l’assassinat de son époux. La rédaction.

Voici le texte de la déclaration:

Défendons la mémoire de Lounès Matoub

Lounès Matoub incarne l’esprit de liberté, celui de la résistance, de la chanson qui éveille. C’est cet esprit que le régime algérien a combattu et combat encore par la censure, la répression, l’injustice, l’humiliation qu’il fait subir aux populations, l’instrumentalisation de l’histoire et de la langue amazighe ; Lounès ne disait-il pas « Int-iyi isem Amaziɣ ma d tilelli s tegrawla ? » (Dites-moi si “Amazigh” ne signifie-t-il pas “Liberté par la révolution” ?). Mais voilà que ce système que Lounès a combattu de toutes ses forces, système d’hier qui demeure celui d’aujourd’hui, prétend vouloir préserver sa mémoire et son patrimoine artistique et culturel en finançant un musée qui va porter son nom. Il s’agit tout simplement d’une profanation et de la volonté de neutraliser le symbole qu’il incarne.

En tant que veuve de Matoub Lounès, je suis étonnée, encore une fois, d’apprendre, par la presse, l’existence d’un projet qui concerne mon époux. Par cette déclaration, je tiens à informer l’opinion publique de ma ferme opposition à ce projet qui aura comme conséquence de dénaturer ses biens matériels : le projet tel qu’il est annoncé par les autorités algériennes prévoit même « d’intégrer la maison familiale » dans l’édifice du musée. Sa demeure qui abrite ses souvenirs les plus précieux, à l’exemple de ses instruments de musique et des prix qui lui ont été décernés, doit rester tels qu’il les a laissées, reflet de sa vie et de son parcours.

Je refuse que la mémoire de Lounès soit souillée et que son combat soit perverti et instrumentalisé. Comment oser prétendre œuvrer pour la préservation de l’héritage culturel et artistique de Lounès lorsqu’on combat la liberté d’expression, l’une des valeurs pour lesquelles il a lutté.

Lounès s’est imposé comme le poète exemple de la mémoire fidèle. Notre mémoire est condition de notre conscience et du chemin à emprunter pour préserver le souvenir du symbole de la liberté et de la résistance. La mémoire de Lounès est le patrimoine de l’ensemble des Amazighs à qui il revient de la défendre. Réflexion, discernement et vigilance sont de rigueur dans notre action de mobilisation afin d’entretenir dignement son souvenir.

Nadia Matoub,
Paris, le 9 septembre 2018

 

L’environnement en Algérie : Un désastre en gestation

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Trouver les mots qu’il faut pour qualifier l’état de l’environnement en Algérie est un exercice difficile. Les Algériens doivent, au quotidien, se frayer un chemin entre les amas d’ordures et composer avec des épidémies d’une autre époque.

Régulièrement présente dans toutes les discussions, la question de la collecte et du traitement des ordures ménagères et des déchets industriels demeure une source d’inquiétudes pour les Algériens. La récente épidémie de choléra, qui marque la fin des vacances, n’est qu’une alerte sur la gravité de la situation et l’urgence d’une solution.

Le constat est plus qu’alarmant. C’est un véritable désastre écologique qui est en cours en gestation à travers tout le pays. En effet, aucune parcelle, aucun espace, y compris ceux censés être des lieux de détente de villégiature, n’échappent à l’invasion des déchets de toutes natures et origines. Les sacs et bouteilles en plastiques, les emballages de tout genre (verre, carton, métaux…) et les eaux usées enveniment le quotidien des algériens et rendent l’air irrespirable.

Les décharges sauvages se multiplient à travers les villes et les campagnes du pays, n’épargnant aucun espace, y compris les lieux dits de tourisme ou de détente. La situation est d’autant plus inquiétante qu’elle doit faire face à l’indifférence des uns et l’irresponsabilité des autres. Tout le monde s’accorde à dire que cela ne peut et ne doit durer, car les conséquences risquent d’être désastreuses pour la santé publique et pour l’environnement.

Cependant, face à la gravité du diagnostic et à l’urgence d’une réaction, force est de constater que c’est plutôt l’indifférence et du citoyen et l’incurie des responsables qui prévalent. La collecte des déchets se fait de manière occasionnelle, laissant s’entasser des milliers de tonnes de déchets aux abords des routes et des trottoirs. Quant à l’industrie du recyclage, elle est totalement absente du programme économique du gouvernement.

Abandonné par les pouvoirs publics et malmené par les citoyens, le pays s’écroule progressivement et irréversiblement sous le poids des déchets. Un abondant des territoires qui met en péril l’homme et l’environnement, alors qu’on assiste, au niveau mondial, à un regain de dynamisme et une reprise en main du combat pour la protection de la planète.

Par Hakim Taibi