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Ministère des Affaires étrangères

Dans l’art subtil de la diplomatie, l’Algérie s’est imposée comme une gymnaste hors pair, enchaînant les contorsions stratégiques avec une agilité déconcertante. Entre Moscou, Washington et Pékin, Alger jongle avec ses alliances comme un équilibriste sur un fil tendu au-dessus du vide. Quant à Paris ? Un spectateur désabusé relégué au rôle de l’ancien amant déçu.

L’Algérie et la Russie, c’est une vieille histoire d’amour, cimentée par des chars, des missiles et des contrats d’armement en pagaille. Le Kremlin continue d’alimenter les entrepôts de l’ANP, faisant de l’Algérie l’un de ses clients les plus fidèles.

Et puis, il y a l’affinité idéologique : un régime qui préfère le pragmatisme autoritaire à la cacophonie démocratique, ça crée des liens. En retour, Alger s’abstient prudemment sur les résolutions de l’ONU condamnant l’invasion de l’Ukraine, préservant ainsi une neutralité qui n’en est pas vraiment une.

D’un autre côté, l’Algérie sait que jouer les satellites russes a ses limites. Dans un monde où l’on ne peut plus se contenter d’une seule carte, Alger flirte aussi avec Washington. Les Américains, toujours à l’affût d’influencer la région, ferment les yeux sur certaines pratiques locales en échange d’une stabilité régionale garantie et d’une écoute sur les questions de lutte contre le terrorisme. Certes, la Maison-Blanche n’a pas la même ferveur que Moscou, mais elle sait récompenser les « bons élèves » par quelques gestes symboliques : accords économiques, coopération sécuritaire, et cette douce illusion de reconnaissance internationale.

Et puis, il y a la Chine. Silencieuse, efficace, redoutablement pragmatique. Pékin ne s’embarrasse pas de questions de droits de l’homme ou de libertés individuelles. Non, ce qui compte, c’est le béton, les infrastructures, et les contrats juteux. Les entreprises chinoises sont partout en Algérie : elles construisent routes, hôpitaux, barrages et raffineries à la chaîne. En échange, Pékin s’assure un accès privilégié aux ressources naturelles algériennes et un marché captif pour ses produits.

Et Paris dans tout ça ?Autrefois omniprésente, la France assiste impuissante à sa relégation. Les relations franco-algériennes oscillent entre rancœurs historiques et malentendus diplomatiques. Chaque tentative de réchauffement est émaillée de polémiques, entre mémoires blessées et intérêts économiques contrariés.

L’Algérie, équilibriste ou funambule en sursis ?Dans ce grand jeu des puissances, Alger a fait son choix : diversifier ses partenaires, maintenir un équilibre instable, et se positionner comme un acteur incontournable. Mais cette posture est-elle tenable sur le long terme ?

Si le grand écart diplomatique offre des marges de manœuvre, il comporte aussi le risque d’une chute brutale. L’histoire récente a montré que jouer sur plusieurs tableaux peut vite devenir une danse dangereuse, surtout quand les partenaires eux-mêmes redéfinissent leurs priorités. L’Algérie peut-elle indéfiniment osciller entre ses différentes alliances sans devoir faire un choix plus clair ? La suite de l’histoire nous le dira.

En conclusion, l’Algérie s’impose comme la gymnaste diplomatique du XXIe siècle, jonglant avec ses partenaires comme un équilibriste sur un fil tendu, entre Moscou, Washington et Pékin, tout en jetant un regard distrait à Paris, relégué au rang de spectateur éploré. La grande question demeure : jusqu’à quand cependant l’Algérie pourra-t-elle continuer cette danse acrobatique sans risquer une chute vertigineuse ? La diversité de ses alliances peut sembler être une force, mais elle a aussi un goût d’illusion, car dans le monde impitoyable de la géopolitique, même l’équilibriste le plus habile peut voir son fil se rompre. À ce moment-là, peut-être que Paris, dans sa posture désabusée, aura trouvé une nouvelle stratégie pour reprendre le jeu… ou pas.

Et qui sait, peut-être que ce grand écart diplomatique d’Alger ne cache en réalité qu’un dernier tour de passe-passe, une manière subtile de garder toutes les options ouvertes, tout en sachant pertinemment que l’heure des choix viendra inévitablement. L’Algérie pourrait bien finir par se retrouver à devoir choisir entre ses alliés historiques et ses partenaires plus récemment choisis, ce qui pourrait bien la contraindre à une nouvelle gymnastique stratégique encore plus acrobatique. Mais après tout, dans ce numéro d’équilibriste, pourquoi se presser de choisir ? Tant que les contrats échouent et les partenariats fructifiants, l’Algérie pourrait bien savourer cette période de flottement. Une fois le rideau tombé, qui se souviendra du funambule en sursis ?

Peut-être que dans quelques années, lorsque l’Algérie aura épuisé ses acrobaties diplomatiques, on se souviendra de cette époque comme celle où la danse du grand écart a été la règle et non l’exception. Mais comme toute performance de cirque, la tension monte inévitablement, et la chute, si elle survient, pourrait être d’autant plus spectaculaire. À moins que, dans une pirouette finale, l’Algérie ne parvienne à transcender ce jeu d’équilibre et à imposer un scénario où ses anciens partenaires, désormais lassés de ses jongleries, viendront elle-même à sa rencontre, en quête de nouveaux repères. Mais tout cela, bien sûr, relève encore de l’art de la diplomatie… ou de l’illusion de la maîtrise.

Au fond, la grande question reste celle de la durée. Le jeu d’équilibre d’Alger, si habilement orchestré, peut-il vraiment échapper aux lois du temps et de la pression géopolitique ? Car dans ce monde où les alliances sont souvent plus fragiles que le fil d’un funambule, le moindre faux mouvement pourrait transformer une danse délicate en une chute brutale. Peut-être que, dans un ultime acte de cynisme, l’Algérie sacrifiera cette posture acrobatique au profit d’un choix plus radical, mais plus risqué. Car après tout, l’histoire a montré que ceux qui osent remettre en question le statu quo finissent parfois par en redéfinir les règles. Mais en attendant, le grand écart diplomatique continue, avec, pour spectateurs, des puissances prêtes à applaudir… ou à se détourner.

« Dans le jeu des puissances, l’équilibre est une illusion, et l’Algérie, funambule aguerri, sait qu’à force de danser sur le fil, le moindre faux pas peut tout faire basculer. »

Dr A. Boumezrag

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