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jeudi 13 mars 2025
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Algérie : On imprime des dinars, on brûle des pétrodollars !

Parfois, l’économie d’un pays se résume en une simple formule. Pour l’Algérie, celle-ci tient en dix mots : « On imprime des dinars, on brûle des pétrodollars ». Une recette vieille comme la rente, appliquée avec une rigueur quasi scientifique par une bureaucratie qui a fait du surplace une discipline olympique.

Dans ce pays où la planche à billets tourne plus vite que la diversification économique, les dinars sortent des imprimeries à la pelle, comme s’ils avaient une valeur intrinsèque. Entre 2019 et 2022, la Banque d’Algérie a massivement eu recours à la planche à billets, injectant près de 65 milliards de dollars en monnaie locale, provoquant une dépréciation massive et une inflation galopante.

Pendant ce temps, les pétrodollars, eux, s’évaporent, dilapidés entre subventions aveugles (30 milliards de dollars annuels), importations massives (45 milliards de dollars en 2023) et grands projets fantômes qui finissent souvent en terrains vagues. L’argent coule à flot, mais comme une eau fuyante qui n’arrose jamais les bonnes récoltes.

La logique est implacable : lorsque l’État n’a plus assez de devises, il imprime plus de dinars, dévaluant au passage la monnaie locale, histoire que chacun se retrouve plus pauvre sans vraiment comprendre pourquoi. Inflation ? Coûts de la vie en hausse ? Pas grave, on en imprimera encore ! Le taux d’inflation officiel frôle les 10 % en 2023, mais en réalité, les prix des produits de base ont explosé, rendant la vie quotidienne de plus en plus difficile.

Que dire des réformes structurelles tant promises ? Elles sont comme le mirage du désert : visibles de loin, mais jamais atteignables. Pendant que le monde investit dans la technologie, l’innovation et les industries d’avenir, nous perfectionnons l’art d’attendre la prochaine montée du baril. Le Fonds de régulation des recettes (FRR), censé être une réserve de stabilisation, a été vidé dès 2017, laissant l’État vulnérable aux chocs pétroliers.

Les jeunes fuient ? Normal, un pays qui fabrique du papier-monnaie plutôt que de la richesse ne fait rêver personne. Plus de 300 000 Algériens quittent chaque année leur pays en quête d’opportunités à l’étranger. L’investissement est au point mort ? Difficile de croire en un système économique où le calcul de rentabilité se résume à espérer que le prix du Brent sauve encore la mise.

Mais pourquoi s’inquiéter ? On trouvera toujours un moyen de colmater les fissures. Plus de taxes ici, une dévaluation discrète là, quelques promesses vides enrobées d’un discours officiel bien huilé. Pendant ce temps, les dinars coulent à flots et les pétrodollars s’envolent… jusqu’au jour où l’un des deux viendra à manquer. Devinez lequel en premier ?

Une économie à la croisée des cheminsL’Algérie se trouve à un tournant crucial. Soit elle prend conscience de la nécessité d’une transformation profonde, soit elle continue à s’enfoncer dans une gestion de crise perpétuelle. Des secteurs comme l’agriculture, les technologies de l’information et les énergies renouvelables restent sous-exploités, alors qu’ils pourraient offrir une véritable alternative à la rente pétrolière.

Des pays autrefois aussi dépendants que l’Algérie du pétrole, comme les Émirats arabes unis ou la Norvège, ont su amorcer un tournant stratégique. La Norvège, par exemple, a constitué un fonds souverain qui gère près de 1 500 milliards de dollars, garantissant ainsi la stabilité à long terme. L’Algérie, en revanche, continue à compter sur des fluctuations du marché qu’elle ne contrôle pas.

Alors, combien de temps encore avant que le réveil ne soit brutal ? L’histoire nous a appris que les pays qui persistent dans l’immobilisme finissent toujours par en payer le prix fort. Il est temps que l’Algérie choisisse entre la réforme courageuse ou la banqueroute annoncée. L’horloge tourne.

L’Algérie se trouve à un moment charnière de son histoire économique. Continuer à imprimer des dinars tout en brûlant des pétrodollars ne fera que précipiter le pays dans une impasse. L’heure n’est plus aux demi-mesures ni aux discours creux, mais à une transformation radicale du modèle économique.

La rente ne pourra éternellement masquer l’absence de production réelle ni empêcher la dévaluation continue du dinar. Seule une diversification audacieuse, un assainissement de la gestion publique et une rupture avec la logique rentière permettront d’éviter une crise irréversible.

Si l’Algérie ne saisit pas cette opportunité, elle risque de se réveiller un jour avec une planche à billets qui tourne à vide et un Trésor public en faillite . La rente est une illusion de prospérité : elle donne l’illusion d’une richesse infinie, mais elle finit toujours par s’épuiser.

«  Un pays qui vit de sa rente est un pays qui a choisi d’acheter du temps plutôt que de construire son avenir. Mais tôt ou tard, l’horloge s’arrête. »

Dr A. Boumezrag

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