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vendredi 22 novembre 2024
ActualitéAlgérie : comment la mobilisation du peuple a changé le discours d’Ahmed Gaïd Salah

Algérie : comment la mobilisation du peuple a changé le discours d’Ahmed Gaïd Salah

Depuis le début du mouvement populaire avec la grande manifestation du 22 février 2019, l’évolution du discours de Ahmed Gaïd-Salah, chef d’Etat-major de l’armée nationale populaire connaît une évolution remarquable pour ne pas dire spectaculaire.

Le Gaïd Salah qui soutenait mordicus le cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika, celui qui lançait des mots durs à l’égard des opposants qualifiés “d’ingrats” qui ne reconnaissent pas ses “réalisations”, cet homme-là a littéralement disparu depuis l’invasion pacifique et colorée des rues par les Algériens.

Et on aurait tort sans doute de confondre cette évolution dans le discours de Ahmed Gaïd Salah avec le faux changement d’Ahmed Ouyahia qui parle de la nécessité de répondre “dans les meilleurs délais” aux revendications du peuple tout en restant collé à la feuille de route proposée par Bouteflika et  rejetée avec éclat par les gigantesques manifestations du 15 mars. Il est clair qu’il ne faut pas confondre le RND, parti créé par le régime, totalement embarquée de le bateau surréaliste du cinquième mandat, avec l’armée nationale populaire.

Exit la référence à Bouteflika

Depuis le 22 février 2018, le Gaïd-Salah, personnellement engagé derrière le président Bouteflika, a disparu pour laisser place à un autre, celui qui parle uniquement au nom d’une armée prenant acte de plus en plus clairement du rejet du régime par la population algérienne. Et dans ce discours et avant même le retour du chef de l’Etat au pays, la  référence au président Bouteflika a pratiquement disparue et aux élections a disparue.

Les messages sont clairement limités à la relation privilégiée entre “l’armée et le peuple”. Un peuple dont le “grand sens de patriotisme et d’un civisme inégalé” est glorifié. Très clairement, l’armée est en train – si ce n’est déjà fait – de se désolidariser du régime en multipliant les messages en direction du peuple. Elle  demeurera, dit son message d’aujourd’hui envoyé à partir de la 3e région militaire, “conformément à ses missions, le rempart du peuple et de la nation dans toutes les conditions et les circonstances.”

Le chef en titre de l’armée prend ainsi acte du fait que le mouvement populaire distingue avec un sens politique aiguë tt entre l’Etat qu’il veut préserver et revitaliser par des institutions exprimant réellement la volonté populaire et le régime dont il veut le départ définitif.

Gaïd-Salah en prend acte en refusant de s’enfermer dans la “feuille de route” de Bouteflika qui n’est pas du tout évoquée dans le message diffusé par le ministère de la défense nationale.

“Toute personne sage et circonspecte est consciente, de par son patriotisme et sa clairvoyance, que pour chaque problème existe une solution, voire plusieurs, car les problèmes, aussi complexes qu’ils soient, trouveront indéniablement une solution convenable, voire adéquate.”

 

“Une solution, voire plusieurs”

Ce n’est pas encore franchement un soutien à ceux qui appellent au départ du régime et à la mise en place d’un gouvernement de transition pour mettre en place une nouvelle. Mais c’est une prise de distance remarquable à l’égard du plan de sauvetage du régime que représente la feuille de route de Bouteflika.

Le cinquième mandat, survenant après un quatrième mandat infantilisant et paralysant, était surréaliste pour le commun des Algériens. Mais le régime qui a dérivé vers une monarchie insultante pour l’histoire du peuple Algérien a finalement commis avec le rituel du cadre, le cirque morbide du rassemblement de la coupole organisé par l’appareil du FLN,  l’impudence de trop, la violence symbolique de trop; celle qui a fait que les Algériens sortent de leurs gonds pacifiquement, surpris et heureux, de découvrir qu’au-delà de leurs différences et de leurs divergences, ils ne pouvaient plus accepter.

C’est cette radicalité paisible qui rappelle que “joumhouriya machi mamlaka” qui est exprimée par le peuple Algérien, lequel n’entend pas accorder une “minute de plus” au régime. La puissance de ce mouvement ne pouvait pas ne pas être entendue par l’armée. Et elle le dit de plus en plus ouvertement.

Le mouvement populaire aura déjà réussi à obtenir l’engagement sans cesse renouvelé depuis quelques semaines que l’armée restera du côté du peuple et non du régime. Que cela vienne de Gaïd Salah, lui-même, n’est plus qu’éloquent.De quoi conforter les appels à maintenir vivace la mobilisation pacifique du peuple pour le départ du régime et l’engagement résolu vers le changement.

 

Source Huffpostmaghreb

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