Mira Moknache, son avocat Sofiane Ouali et cinq anciens détenus d’opinion, ainsi que le fils de l’un d’eux, sont toujours maintenus en garde à vue au commissariat central de Bejaïa. Ils n’ont pas été autorisés à recevoir la visite de leur famille et de leurs avocats.
L’enseignante universitaire et militante politique Mira Moknache a été arrêtée le lundi 7 juillet, et son domicile familial à El Kseur a été perquisitionné par des éléments de la BRI en sa présence menottée.
L’avocat Sofiane Ouali, membre du collectif de défense des détenus d’opinion et également l’avocat de Mira Mokncahe, a été arrêté par des éléments de la gendarmerie la nuit du 9 au 10 juillet à 3 heures du matin, à Tichy, à Bejaïa. Il était en compagnie des anciens détenus d’opinion Khoudir Bouchelaghem, Rafik Belayel, Tahar Achiche, Ghilas BenKerou, Rafik Belayel, Malek Boudjemaa et le fils de ce dernier, Mokrane Boudjemaa. Ils sont maintenus en garde à vue au commissariat central où se trouve également Mira Moknache.
Selon le CNLD, des membres de la famille de Mira Moknache se sont rendus au commissariat à deux reprises mais n’ont pas été autorisés à la voir. Un groupe d’avocats de Bejaïa a tenté de voir Me Ouali, mais ils n’ont pas été autorisés sous prétexte que l’enquête était toujours en cours. Selon la loi algérienne, une personne en garde à vue n’est autorisée à recevoir la visite d’un avocat qu’après 48 heures de détention.
Prolongation inquiétante de la garde à vue
Mira Moknache est à son sixième jour de garde à vue, tandis que Me Ouali et les cinq militants en sont à leur quatrième jour. Selon l’article 65 du Code des procédures pénales, la période de garde à vue ne doit pas excéder 48 heures pour présenter l’inculpé devant le parquet. La garde à vue est renouvelable deux fois en cas d’atteinte à la sécurité de l’État, et jusqu’à cinq fois dans le cas des crimes organisés, terroristes ou subversifs.
Il convient de rappeler que Mira Moknache fait face à un acharnement policier et judiciaire depuis le Hirak en raison de son militantisme pacifique. Elle a été poursuivie pour « terrorisme » (article 87 bis du code pénal), en l’occurrence le MAK, un mouvement politique classé comme organisation terroriste par l’État algérien. Bien qu’elle ait été acquittée dans l’une de ces affaires, un tribunal d’Oran l’a condamnée à trois ans de prison ferme en appel. Son affaire est actuellement pendante devant la Cour suprême. Par ailleurs, son procès avec 47 autres militants prévu à la Cour d’appel d’Alger le 11 juillet pour les mêmes accusations a été reporté à la prochaine session criminelle en raison de son absence, étant actuellement en garde à vue. Les militants actuellement en garde à vue en sa compagnie sont des anciens détenus d’opinion et font également l’objet de poursuites pour « terrorisme ».
Me Haddouche dénonce une détention arbitraire
L’avocate Nacera Haddouche a exprimé son indignation et sa solidarité avec Me Ouali et les militants pacifiques arrêtés en sa compagnie. Dans un communiqué posté sur son compte Facebook, elle a dénoncé l’arrestation arbitraire de l’avocat défenseur des droits humains : « Le Groupe de travail sur la détention arbitraire est catégorique sur la question : les personnes privées de liberté ont le droit d’être assistées par le conseil de leur choix à tout moment pendant la détention, y compris immédiatement après l’arrestation, et cet accès doit être accordé dans les meilleurs délais », a-t-elle souligné.
« Le fait d’interdire à notre confrère Me Sofiane Ouali et aux autres détenus de contacter leurs avocats pendant leur garde à vue constitue une violation de leur droit de communiquer avec le conseil de leur choix en vertu de l’article 14, paragraphe 3 B, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par l’Algérie le 17 mai 1989, et de l’article 154 de la Constitution, qui stipule que les traités ratifiés par le Président de la République, dans les conditions fixées par la Constitution, sont supérieurs à la loi. Dans l’exercice de sa mission, le juge est tenu d’appliquer ces traités ratifiés », a-t-elle précisé.
L’avocate a également rappelé les noms des avocats poursuivis, dont certains ont été emprisonnés, pour leur engagement en faveur des libertés, citant « Me Raouf Arslane, Me Yacine Khelifi, Me Mohamed El Amine Bendahmane, Me Mohamed Mekkaoui, Me Omar Boussag et Me Mehdi Zidane ».
Mary Lawlor « inquiète »
La Rapporteuse spéciale auprès de l’ONU sur la situation des défenseurs des droits humains, Mary Lawlor, a réagi à cette arrestation : « J’ai reçu des nouvelles inquiétantes selon lesquelles l’un des avocats des droits humains algériens que j’ai rencontrés en Algérie, Soufiane Ouali, a été détenu, mais j’ignore encore les motifs. Je continuerai à suivre de près l’affaire », a-t-elle indiqué.