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vendredi 21 février 2025
ActualitéLe futur franco-algérien : ni ensemble, ni séparés, juste égarés

Le futur franco-algérien : ni ensemble, ni séparés, juste égarés

Chronique d’une relation impossible à vivre, mais impossible à rompre. Il fut un temps où l’on rêvait d’une réconciliation. Où les présidents se promettaient la main dans des sourires croustillants, où les commissions mémorielles s’acharnaient à trouver un mot qui ne froisse ni l’un ni l’autre, où l’on croyait encore que l’Histoire allait finir par lâcher nos chevilles.

À l’aube de 2025, la relation franco-algérienne continue de naviguer entre passion refoulée et rancune tenace , entre coopération contrainte et disputes publiques , entre nostalgie coloniale et rejet nationaliste . Un couple toxique où chacun se méprise mais refuse de couper les ponts. Un divorce impossible, une réconciliation impensable.

On se parle, on s’échange des visas, des accusations et du gaz. On signe des accords qu’on renégocie aussitôt, on se jette des regards noirs avant de s’envoyer des émissaires. On se tolère sans s’aimer, on se déteste sans se quitter.

Un passé qui refuse de mourir

À chaque sommet bilatéral, le rituel est le même : Côté français, on « reconnaît » des événements historiques, mais sans aller jusqu’à demander pardon.

 Côté algérien, on exige des excuses, des compensations, des archives, une repentance complète, et pourquoi pas un petit chèque au passage.

Résultat : on fait semblant d’avancer tout en restant bloqués dans le passé . La mémoire collective se transforme en un champ de bataille idéologique. On demande aux jeunes de « tourner la page », mais comment le faire quand on vous la plaque sur la figure à chaque discours politique ?

Et bien sûr, les commémorations sont toujours synchronisées avec les élections . Côté français, sur recycler la peur de l’« invasion migratoire ». Côté algérien, on brandit la France comme le bouc émissaire favori, responsable de tout, du chômage aux coupures d’eau.

L’Algérien en France : bienvenu, mais pas trop

Officiellement, la France veut moins d’Algériens. Dans les faits, elle en a toujours autant et elle en aura toujours besoin. Parce que les usines tournent, parce que les hôpitaux recrutent, parce que les cuisines des restaurants ne se remplissent pas toutes seules.

Les travailleurs sans papiers ? On les expulse à la télé, mais on ferme les yeux quand ils construisent nos immeubles. Indésirables dans les urnes, indispensables dans l’ombre.

Et puis, il y a l’hypocrisie des visas . On les restrictions pour « lutter contre l’immigration clandestine », mais on laisse une grande brèche pour les élites algériennes qui envoient leurs enfants dans les grandes écoles françaises. On ferme la porte aux pauvres, on déroule le tapis rouge aux héritiers.

Mariage ou visa, l’amour sous contrôle administratif

L’histoire d’amour franco-algérienne se joue aussi dans les préfectures. Les couples mixtes doivent prouver que leur amour n’est pas un prétexte pour obtenir des papiers .

Les Algériens qui demandent un visa doivent jurer qu’ils repartiront , alors que tout est fait pour qu’ils restent.

L’absurde atteint son sommet quand un mariage entre un Français et un Algérien devient une épreuve administrative digne des Douze Travaux d’Astérix :

 Fournir une tonne de justificatifs

 Passer des entretiens humiliants pour prouver que ce n’est pas un « mariage gris ».

 Attendre des mois, voire des années, pour obtenir un titre de séjour.

Pendant ce temps, les politiciens français dénoncent les syndicats de complaisance, alors qu’ils signent des accords avec l’Algérie pour faire venir plus de main-d’œuvre.

Le fantasme du « retour au bled » et l’eldorado européen

De l’autre côté de la Méditerranée, on rêve encore de France tout en la maudissant.

L’État algérien exalte la grandeur du pays, l’amour de la patrie, l’orgueil national … pendant que sa jeunesse se rue sur les bateaux de fortune et les dossiers d’attente pour un visa.

Le paradoxe est total : on défend l’Algérie, mais on rêve de la France.

Les discours officiels prônent la fierté nationale, mais le système éducatif et économique algérien ne laisse d’autre choix que l’exil. Et que fait la France face à cette fuite ?

Elle renforce ses frontières mais continue d’accueillir les cerveaux et les soutiens-gorge dont elle a besoin.

Elle condamne les harragas (migrants clandestins), tout en étant bien contente de les exploiter une fois sur son sol.

2025 : vers un avenir… sans avenir ? Alors, où va cette relation ? Nulle partie, mais ensemble.

L’Algérie continue de se débattre avec son passé tout en expédiant ses jeunes ailleurs.

La France continue de prôner la fermeture des frontières tout en profitant d’une immigration de main-d’œuvre.

Les discours changent, les politiques s’adaptent, mais la mécanique reste la même.

On ne veut pas couper les ponts, mais on refuse de les solidifier.

On ne veut pas se séparer, mais on n’arrive pas à s’unir.

On est condamné à cohabiter, à se chamailler, à s’exploiter, à se renvoyer la faute.

Un duo inséparable, mais incapable d’avancer ensemble. Un avenir sans rupture, mais sans espoir non plus.

Au final, la relation franco-algérienne ressemble à une vieille querelle de famille : trop de souvenirs pour se tourner le dos, trop de rancœurs pour s’embrasser franchement. On se tolère sans s’aimer, on se rejette sans se quitter.

Chaque crise alimente un nouveau cycle de tensions, chaque accalmie est une très fragile avant la prochaine dispute. Un avenir fait d’allers-retours, de faux départs et d’impasses bien entretenues.

Alors, si l’Histoire se répète, autant lui donner raison : « Ni ensemble, ni séparés, juste égarés. »

« L’Algérie et la France, c’est comme un couple qui a divorcé mais qui vit toujours sous le même toit. Chacun fait semblant de refaire sa vie, mais personne ne rend les clés. »

Dr A. Boumezrag

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