L’historien algérien Mohamed Harbi a commenté les imposantes marches citoyennes rejetant le prolongement du mandat présidentiel de Bouteflika.
« Le surgissement populaire du 22 février constitue une rupture majeure dans notre histoire, comme dans celle du Maghreb. Il s’agit de la consolider et d’élargir le champ des possibles. Aujourd’hui, les Algériens ont remporté une première victoire », affirme-t-il dans une tribune cosignée avec Nadjib Sidi Moussa, publiée aujourd’hui sur les colonnes d’El-Watan.
« Notre tâche prioritaire est de tirer la leçon du soulèvement d’octobre 1988 et d’éviter à nouveau le détournement du fleuve, à savoir la confiscation de la souveraineté populaire qui est à l’origine de l’autoritarisme sous sa forme actuelle. Nous sommes devant une nouvelle crise du régime, mais le peuple algérien a déjà tranché. Le FLN a vécu, le 5e mandant aussi. L’annonce du Président, ce 11 mars 2019, ne fait qu’entériner cet état de fait », souligne cet historien selon lequel le plus grand souci est celui de la tentation des anciens partisans du statu quo de se recycler à travers un repositionnement en faveur de ce mouvement populaire. « Sans céder à l’esprit de revanche, il nous faut prendre garde à ce que les anciens partisans du statu quo ne se rachètent pas une virginité au nom d’une transition qui renouerait insidieusement avec l’ancien régime et ses pratiques (corruption, clientélisme, prédation, etc.) », avertit-il, estimant ainsi que « la démocratie, que chacun revendique désormais à voix haute, est tout le contraire du consensus dont nous subissons les conséquences ».
Pour Harbi, « la République est à refonder, en rupture avec les tentations despotiques assimilées à la monarchie par les acteurs du surgissement populaire ». Il appelle à ce que les aspirations des « classes laborieuses », dont les femmes et la jeunesse constituent les moteurs, soient affirmées dès à présent. « Il faudra donc respecter leur autonomie d’organisation et d’action. Dans cette perspective, l’égalité des sexes est indiscutable ».
Mohamed Harbi déclare son soutien aux classes populaires dans leur volonté de « gérer elles-mêmes leurs propres affaires ». « Car, il ne peut y avoir de démocratie réelle sans prise en compte de leurs aspirations spécifiques », assure-t-il.
Par Hani Abdi
Source : Algérie-patriotique