Alors qu’Ottawa va imposer, en représailles, des droits de douanes sur certains produits américains dès mardi 4 février, Mexico dit vouloir suivre le même chemin.
La présidente mexicaine fustige également une « calomnie » après que Donald Trump a accusé son gouvernement d’entretenir des liens avec les cartels du narcotrafic. Quant à la Chine, elle promet de prendre des mesures « correspondantes » et affirme vouloir déposer plainte contre Washington auprès de l’OMC.
Alors que Donald Trump a mis sa menace de guerre commerciale à exécution, samedi 1er février, en imposant 25% de droits de douane sur les produits provenant du Canada et du Mexique, et 10% supplémentaires à ceux déjà existants sur les produits chinois, Ottawa et Mexico ont aussitôt annoncé répliquer.
En s’en prenant aux trois principaux partenaires commerciaux des États-Unis, le président américain affirme vouloir les forcer à agir pour diminuer le trafic de fentanyl et les arrivées de migrants illégaux sur le territoire américain.
Les cartels ont « fait alliance avec le gouvernement mexicain », selon Donald Trump
La taxation américaine entrera en vigueur au plus tôt mardi 4 février, selon un premier décret présidentiel que l’AFP a pu consulter. En cause selon lui : « la menace majeure que représentent les migrants illégaux et les drogues mortelles qui tuent nos concitoyens, notamment le fentanyl. Nous devons protéger les Américains et c’est mon devoir en tant que président de m’assurer de la sécurité de tous », a-t-il écrit.
Selon Donald Trump, la Chine exporte vers le Mexique des principes actifs permettant la fabrication par les cartels mexicains du fentanyl ensuite vendu de l’autre côté de la frontière. Il reproche également au Mexique et au Canada de ne pas suffisamment contrôler les flux migratoires vers les États-Unis.
« Les droits de douane annoncés sont nécessaires pour forcer la Chine, le Mexique et le Canada à rendre des comptes à la suite de leurs promesses de faire cesser le flux de drogues toxiques aux États-Unis », a expliqué la Maison Blanche sur son compte X.
Concernant le Mexique, ils resteront en place « jusqu’à ce que le [pays] coopère avec les Etats-Unis pour lutter contre le trafic de drogue. Les cartels mexicains sont les premiers trafiquants mondiaux de fentanyl, méthamphétamine et d’autres drogues ».
La présidence américaine a également affirmé que les cartels avaient « fait alliance avec le gouvernement mexicain », sans pour autant fournir de preuves. Une affirmation qualifiée de « calomnie » par Claudia Sheinbaum.
Quant au Canada, la présidence américaine a estimé que « la production de fentanyl y progresse ». La Chine, pour sa part, « joue un rôle central dans [cette] crise de fentanyl qui détruit des vies américaines » et les droits de douane s’appliqueront « jusqu’à ce nous nous assurions de la pleine coopération » de Pékin en la matière, selon la même source.
Le Canada, « œil pour œil, dent pour dent », version commerciale
Face à ces mesures décrétées par Trump, le Premier ministre canadien a annoncé qu’une partie des marchandises américaines seraient également taxées, comme le rapporte la correspondante de Rfi à Montréal. Jus de fruits, chaussures, meubles, vin, équipements sportifs… Le Canada a annoncé imposer « des droits de douane de 25% sur des produits américains pour un total de 155 milliards de dollars canadiens [102 milliards d’euros] ».
Ces droits de douane seront appliqués sur 30 milliards de dollars de marchandises dès mardi, a ajouté le chef du gouvernement sur un ton très grave et qui a expliqué avoir parlé à la présidente mexicaine.
La liste des biens américains que le Canada va taxer touche une multitude de produits. Une réplique que l’on pourrait qualifier « d’œil pour œil, dent pour dent », version commerciale. Et pourtant, tout en annonçant ces mesures de rétorsion, le Premier ministre Justin Trudeau a souligné la profondeur de la relation avec le peuple américain. Un brin lyrique, il a rappelé les nombreuses fois où Canadiens et Américains se sont épaulés au cours de l’histoire.
Cependant, le dirigeant estime qu’il n’a pas le choix de riposter. Appelant à l’unité, il demande à ses concitoyens de privilégier les produits canadiens dans leurs achats. Par exemple le whisky local plutôt que le bourbon américain.
Le gouvernement mexicain qui n’avait cessé d’appeler au calme et a l’apaisement a, lui aussi, répondu cette fois-ci avec un ton beaucoup plus dur. Dans un long post sur le réseau X, la présidente Claudia Sheinbaum rejette les accusations du président américain sur les liens entre les autorités mexicaines et les groupes criminels. Elle parle de calomnies et rejette même le blâme sur l’accusateur, détaille notre correspondante à Mexico, Gwendolina Duval.
Selon elle, s’il existait une alliance entre un État et les cartels, elle viendrait plutôt de la part des États-Unis qui acceptent de leur vendre des armes. Elle invite également son homologue à prendre des mesures pour combattre les vendeurs de drogues sur son propre territoire… et lutter contre un problème de santé qui concerne surtout les États-Unis.
La cheffe d’État répète que le Mexique ne cherche pas la confrontation, mais pour autant il n’a pas l’intention non plus de se laisser faire. Sans donner plus de détails, Claudia Sheinbaum indique qu’elle a également donné l’ordre de mettre en application un plan pour protéger les intérêts économiques du pays avec entre mesures pour installer à son tour des tarifs douanier.
Quant à la Chine, elle s’est pour l’instant bornée à déclarer « s’opposer fermement » aux nouveaux droits de douanes américains sur les produits qu’elle exporte aux États-Unis, ajoutant que les guerres commerciales n’avaient « pas de vainqueurs » et promettant de répliquer à Washington avec des mesures « correspondantes » pour « résolument protéger » les « droits et intérêts » chinois. Pékin va par ailleurs déposer plainte contre Washington auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), selon le ministère du Commerce.
Avec RFI