Une sinistre farce se joue entre Ankara et Riyad, deux capitales bien connues pour leur défense de la liberté d’expression. Le journaliste saoudien Jamal Khashoggi, 60 ans, ancien conseiller du chef des renseignements du royaume, accusé d’être proche du Qatar et des Frères musulmans par le prince héritier Mohamed Ben Salmane, avait fui l’Arabie en 2017 pour s’installer à Istanbul. Venu au consulat de son pays natal régler quelques problèmes administratifs, il n’en est pas ressorti depuis le 2 octobre.
Erdogan, à la suite des proches de Khashoggi, dénonce un assassinat et convoque l’ambassadeur saoudien. Jouant les avocats de la presse martyre, le maître de la Turquie veut faire oublier que les tribunaux à ses ordres viennent de confirmer la détention à vie de cinq journalistes ! Nos confrères Ahmet et Mehmet Altan, ainsi que quatre autres reporters et éditorialistes vont ainsi passer le reste de leur existence au cachot. Le chef d’accusation est toujours le même : appartenance présumée – et sans aucune preuve – au réseau de l’imam Fethullah Gülen.
La disparition de Jamal Khashoggi sert ainsi d’écran de fumée à la répression sauvage qui s’est abattue sur les médias en terre néo-ottomane. L’affaire remonte jusqu’à Washington.
Au fait, qui a des nouvelles du blogueur saoudien Raif Badawi, fouetté chaque vendredi pour insulte à l’islam avant d’être reconduit en cellule pour dix ans ?
Martine gozlan
Source : Marianne