Les éditeurs de la presse en ligne dénoncent une « campagne de criminalisation du web-journalisme » en Algérie et des « confrères devenus procureurs ».
Des éditeurs de la presse en ligne ont exprimé mercredi 7 novembre à Alger leur solidarité et leur refus de la persécution et de l’emprisonnement des journalistes, la veille du procès de Abdou Semmar et Merouane Boudiab emprisonnés depuis deux semaines pour diffamation présumée.
Le syndicat algérien des éditeurs de la presse électronique (SAEPE) a donc organisé une conférence de presse en solidarité avec les confrères emprisonnés; l’occasion d’évoquer “les dépassements” qui ont caractérisé ces affaires.
S’exprimant lors de la conférence, Saïd Boudour, journaliste et membre du SAEPE, a détaillé des “vices de forme” lors des arrestations des journalistes Abdou Semmar, Merouane Boudiab, Adlane Mellah, Lies Hadibi et Abdelkrim Zeghilache. Il a indiqué que la police judiciaire a appelé les concernés au téléphone avant leurs arrestations.
“Ceci est illégal”, a-t-il affirmé, ajoutant que Adlane Mellah a également été empêché de voir son avocat avant d’être présenté devant le procureur, ce qui est aussi non-conforme au code des procédures pénales.
Cette persécution, affirment les membres du syndicat, a été rendue possible par “un déni qui se poursuit” de la part des autorités de la reconnaissance de la presse en ligne comme médias à part entière.
“Nous attendons plus que jamais du ministre de la Communication des mesures concrètes pour lever l’embargo institutionnel dont est victime la presse électronique”, indiquent ces éditeurs en rappelant avoir proposé au ministère un projet de pacte d’avenir pour l’émergence des médias en ligne en Algérie.
Le syndicat, qui compte désormais plus de 40 éditeurs de presse en ligne, s’est également dressé “contre les comportements de certains confrères devenus procureurs et ennemis de la presse”, a déclaré Ihsane El Kadi, directeur de Maghreb Emergent et membre du syndicat.
La couverture des arrestations faite par la télévision privée Ennahar TV, a été largement critiquée pour “atteinte à la présomption d’innocence”. Ladite télévision avait diffusé en boucle des images des accusés à leur arrivée au tribunal pour comparaître devant le juge d’instruction. La chaîne a aussi avancé des accusations de “chantage et d’extorsion” démenties par l’avocat d’Abdou Semmar.
“Une campagne de criminalisation du web-journalisme a été déclenchée dans certaines télévisions privées alors qu’une d’entre elles, Ennahar TV, est devenue le procureur général à charge contre notre corporation piétinant toute règle de protection des droits du citoyen face à la justice”, a indiqué le syndicat dans un communiqué.
Pour toutes ces raisons, le SAEPE a dénoncé le “recours abusif et injustifié à l’emprisonnement de nos collègues” et a revendiqué leur remise en liberté dans l’attente de leur jugement “si l’instruction sereine du dossier le recommande”.
Le syndicat rejette également la campagne de “stigmatisation” de la presse en ligne. “Nous ne sommes pas des relais de la cyber-dissidence algérienne”, a-t-on martelé dans le communiqué.
“Nous sommes des entreprises et des médias abritant un important capital d’expérience professionnelle, héritage moderne de la grande aventure de la presse algérienne depuis l’indépendance. Nous revendiquons le respect et la considération”, ont ajouté les éditeurs de la presse en ligne.
Abderrahmane “Abdou” Semmar, journaliste et propriétaire du site d’informations Algérie Part, est poursuivi selon son avocat pour diffamation suite à une plainte déposée par Ennahar TV et le wali d’Alger Abdelkader Zoukh. Il sera jugé jeudi 8 novembre au tribunal de Bir Mourad Raïs à Alger.
Par Hamdi Baala
Source : huffpostmaghreb.com