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Élections anticipées en Algérie : Une décision à double tranchant

L’annonce par le président Abdelmadjid Tebboune d’avancer la prochaine élection présidentielle à septembre 2024 a été présentée par l’agence officielle APS comme un signe de retour à la “normalité”. Mais sitôt annoncée, cette décision, qui suscite divers commentaires sur la Toile, a été saluée par de nombreux partis politiques.

Le parti El Moustakbel estime que c’est “une preuve évidente du statut distingué et des relations entre les institutions constitutionnelles et de la sincérité et de la sagesse des nouvelles orientations de l’Algérie”. Ce parti soutient qu’il s’emploie “à approfondir le processus démocratique et préserver les acquis de la nation”. “Les élections présidentielles sont une étape essentielle où le peuple décide et renforce les institutions”, écrit-il.

Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) voit dans ces élections une “nouvelle transformation démocratique” permettant “l’avènement d’une Algérie développée”. Une décision “importante” à traiter “conformément aux mécanismes” internes des partis, probable allusion aux velléités de l’ex-président du MSP Makri. 

Qualifiant la décision de “souveraine”, le FLN y voit “le respect de la volonté du peuple” d’élire son dirigeant “dans un climat démocratique”. Un « rendez-vous majeur” pour “une Algérie victorieuse, forte de ses institutions”.

Le RND considère qu’il s’agit d’une “réponse aux sceptiques”, après les rumeurs de report démenties. Ce scrutin garantira la “continuité de l’État” et la “poursuite des réformes” engagées.

Du côté de l’opposition, les réactions sont plus mitigées. L’UCP a dénoncé un “revirement” par rapport à l’engagement initial de respecter l’échéance légale de décembre 2024. Le FFS s’est montré évasif, annonçant seulement qu’il entendait “jouer un rôle” lors de ce scrutin. Quant au RCD, il s’est interrogé sur “les motivations profondes” ayant conduit à cette décision d’avancer le scrutin présidentiel.

Mais au-delà du discours lisse de l’APS, cette décision du président Tebboune d’écourter son mandat soulève de nombreuses interrogations quant à ses réelles motivations. Simple marque de confiance dans le peuple comme suggéré, ou pari risqué pour un président affaibli cherchant à reprendre l’avantage ?

L’argument géopolitique avancé par l’APS, avec les “menaces extérieures” pesant sur l’Algérie, paraît relever davantage de la justification a posteriori. Le pouvoir traverse en réalité de fortes turbulences, avec les défis énergétiques, les tensions régionales au Mali et en Libye, ou avec le Maroc voisin. 

En avançant le scrutin, M. Tebboune peut vouloir afficher unité et stabilité. Mais rien ne garantit la pérennité de ce pari sur le long terme. L’APS défend la ligne officielle, vantant le “calme” présidentiel. Mais certains arguments, comme la revalorisation citoyenne, sonnent creux au vu des attentes encore insatisfaites du Hirak.

Bien loin d’éclairer véritablement les tenants et aboutissants de cette annonce électorale, le discours officiel laisse ainsi planer de nombreuses zones d’ombre. Un scrutin à hauts risques, dont les dessous restent à analyser.

Kamel AIDOUNE

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